La manière de France

« – Holà, Seigneur Français, cette façon de saluer n’est point d’usage en ce pays.- C’est la manière de France. – La manière de France est bonne pour vos femmes; mais pour les nôtres, elle est un peu trop familière. »
Le Sicilien, sc. XI

Selon une idée communément admise, « les Français ont un fonds de galanterie ».

La « manière de France », « cette pratique infâme » dans les rapports entre homme et femmes, avait été définie par le comportement et les idées du « marquis français », personnage du roman Ibrahim ou l’Illustre Bassa (1641-1643) des Scudéry, réédité en 1665 (1).

Elle avait été contestée ironiquement par La Mothe le Vayer dans le dialogue « Du mariage » (2).

L’excessive jalousie des Italiens est évoquée à la scène 6 de A Christian Turned Turk de Robert Daborne (1612) (3).

 

 

(1)

La princesse, voyant que le marquis était sorti de la compagnie, demanda au comte s’il était vrai qu’il eût fait passer la liberté française à Gênes, comme je lui avais dit dans sa solitude ? – Cela est si véritable, répondit le comte, que, si vous saviez de quelle façon nous vivons, vous en seriez toute surprise. […] Mais est-il possible, disait Justinian, qu’il ait pu vaincre cette jalousie, qui est si naturelle à ceux de notre nation ? […] Il commença à nous persuader, à tous en particulier, la liberté française, à nous appeler tyrans de nos femmes, à nous faire comprendre qu’il y avait une extrême injustice d’interdire la conversation aux dames, qui seules la pouvaient rendre agréable.
(éd. de 1665, p. 3-4)

Toute la compagnie ne peut s’empêcher de la franchise du marquis; la princesse lui demanda lors s’il avait déjà appris la liberté française à sa parente, en lui ayant persuadé de recevoir ses visites sans permissions.
(ibid., p. 78)

 

(2)

C’est pourquoi le procédé des Italiens et des Espagnols à garder leurs femmes, pour ne parler que de nos voisins, bien qu’il soit plus contraire à cette liberté de nature dont vous parliez tantôt, ne laisse pas d’être fondé sur une bien meilleure ratiocination. Car, quelle plus grande stupidité, et quel plus grand aveuglement que le nôtre, qui préférons en mille rencontres l’honneur à la vie, avouons que la plus pure partie d’iceluy dépend de la bonne conduite de nos femmes, savons leurs infirmités et inclinations diamétralement contraires à nos intentions sur ce sujet, et néanmoins les laissons agir en pleine liberté, c’est-à-dire fouler aux pieds ce prétendu honneur, et faisons un vice de la jalousie, par laquelle seule nous pourrions témoigner être amateurs de notre réputation.
(« Du mariage », dans Dialogues faits à l’imitation des Anciens, éd. de 1745, p. 425)

 

(3)

Alors que les pirates Gismund et Dansiker viennent vendre des esclaves au marchand Benwash, juif converti à l’Islam, celui-ci fait examiner la « marchandise » par sa femme et sa belle-soeur et lance à la compagnie :

« […]. You see, gallants, we are not Italianate to lock our women up : we set’em free, give open entertainment. »

Ce à quoi l’un des pirates présents lui répond :

« You are of a noble mind, sir, courtly and high.
It’s want of merit that breeds of jealousy,
From which I know you clear. »
A Christian Turned Turk, or The Tragical Lives and Deaths of the Two Famous Pirates, Ward and Dansiker, Robert Daborne, London, William Barrenger, 1612, (dans Three Turk Plays From Early Modern England Daniel Vitkus edition, 2000, Columbia University Press, New York, p.178)

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