Crocodile

Table des matières

« M’oses-tu bien encor parler? femelle inique?
Crocodile trompeur, de qui le coeur félon
Est pire qu’un satrape, ou bien qu’un Lestrygon. »
Dépit amoureux, I, 5 (v. 330-332)

 

« Ah! crocodile qui flatte les gens pour les étrangler. »
Georges Dandin, III, 6

 

« Ah, crocodile! ah, serpent dangereux! tu me caresses pour me trahir. »
La Jalousie du Barbouillé, sc. XI

Le terme de « crocodile » avait été utilisé pour stigmatiser le sexe féminin dans

– la littérature misogyne du début du XVIIe siècle : de même que celui de « Lestrygon », il apparaît dans La Méchanceté des femmes de Ferville (1618) (1).

Le Berger extravagant (1627) de Charles Sorel (2).

 

Accusées d’être hypocrites et cruelles, les femmes sont semblables à ces monstres peuplant les romans et les épopées, qui pleurent avant de dévorer leur proie, selon un lieu commun illustré, par exemple, dans :

– une gravure du Recueil des plus illustres proverbes de Lagniet évoquant les larmes de crocodiles (1663)
– l’Apologie pour tous les grands hommes qui ont été accusés de magie (1669) de Naudé (3).
– le dictionnaire de Furetière (1690) (4)
Les Tragiques (1616) d’Agrippa d’Aubigné(5)
– un emblème de Joachim Camerarius (1604) (6).
– la traduction française par Blaise de Vigenère (Paris, Cramoisy, 1650) de l’Histoire de la décadence de l’Empire grec et de l’établissement de celui des Turcs, de l’historien hellène Laonicus Chalcondyle (7)

 

 


 

(1)

[La femme est] un crocodile, qui par la feinte de sa pleureuse voix, dévore le crédule sang. […] Un crocodile qui distille incessamment des larmes de dissimulation.
(Ferville, La Méchanceté des femmes, 1618, p. 63-64)

 

(2)

Voulez-vous toujours être un crocodile qui attire les hommes et les dévore, ou une gorgonne et une méduse […] ?
(Le Berger Extravagant, 1627, IV, 1, p. 573)

 

(3)

la ruse du crocodile qui contrefait la voix de l’homme pour dévorer
(Naudé, Apologie pour tous les grands hommes qui ont été accusés de magie, chap. 15, Paris, J. Cotin, 1669, p. 298)

 

(4)

On appelle des larmes de crocodiles les larmes d’un hypocrite, une feinte douleur qui ne tend qu’à surprendre quelqu’un. Les pleurs des Courtisanes sont des larmes de crocodile.
(Dictionnaire de Furetière, entrée « crocodile »)

 

(5)

Et ce pleur n’est qu’un pleur d’un traître crocodile
(D’Aubigné, Les Tragiques IV [1630], Droz, 1932, p. 43)

 

(6)

« Devorat et plorat », Joachim Camerarius, Symbolorum et emblematum ex aquatilibus et reptilibus desumptorum centuria quarta, 1604, emblème LXVII, p. 163.

 

(7)

« Larmes de Crocodile quand il veut dévorer quelqu’un »
(Histoire de la décadence de l’Empire grec et de l’établissement de celui des Turc, 1620, p. 67)

 

(cette indication paratextuelle figure, dans le chapitre consacré au conquérant Tamerlan, en marge du texte qui rapporte la réaction du souverain d’Asie centrale, après l’assassinat de l’un des siens. L’histoire se passe avant que Tamerlan ne devînt roi des Tartares. Un de ses lieutenants, Myrxas, l’avait alors calomnié. Une fois Tamerlan établi sur le trône de Samarcande, un autre de ses officiers, Chaidar, lui rapporta les paroles de Myrxas. Tamerlan résolut de s’en venger. Mais pour sauvegarder son image tant auprès du peuple que des soldats, il chercha quelque moyen de justifier son acte. Bien qu’ayant ordonné son exécution, l’empereur ne laissa pas de pleurer à chaudes larmes la disparition de son capitaine).

Ressources complémentaires

Les spectacles et la vie de cour selon les gazetiers
Chronologie moliéresque
Textes du XVIIe siècle en version intégrale
Textes de Molière en version diplomatique

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