Vous parliez tantôt d’un autre style

« Ce langage, à comprendre, est assez difficile,
Madame, et vous parliez tantôt d’un autre style. »
Le Tartuffe, IV, 5, v. 1485-1605

Un passage de la tragi-comédie Les Trahisons d’Arbiran (1638) de d’Ouville consiste en une entrevue piège destinée à révéler la duplicité de l’hypocrite concupiscent (voir « si je vous faisais voir« ).

 

Pendant que son mari est embusqué, l’épouse feint de répondre favorablement aux avances du traître. Elle doit tout d’abord se justifier sur le fait d’avoir repoussé ses avances lors de leur précédent entretien

ARBIRAN
Je viens encore ici
Pour souffrir tes mépris, ingrate me voici;
J’en ai vu ci-devant assez de témoignage,
Penses-tu maintenant réparer cet outrage ?
O le joli dessein, ingrate, de quel front
Oses-tu m’aborder après un tel affront ?
Viens-tu point maintenant de forger quelque ruse ?
Quelle fourbe, dis-moi, te peut servir d’excuse ?

 

LEONIDE
Dieux ! qu’est-ce que j’entends ? eussé-je présumé
Qu’un prince généreux, après m’avoir aimée,
Après avoir cherché tous moyens de me plaire,
Pour si peu de sujet se fût mis en colère ?
Pensez-vous que je sois ingrate jusqu’au point
D’oublier vos bienfaits et de n’y penser point ?
Non, non, vous vous trompez, je sais bien que ma vie
Par mon mari, sans vous, m’aurait été ravie.
Ce n’est pas la raison que vous soyez privé
D’un bien que par vos soins vous m’avez conservé.

 

ARBIRAN
Pourquoi doncques tantôt, femme ingrate et parjure,
Après m’avoir taxé d’une honteuse injure,
M’as-tu voulu traiter avec tant de rigueur ?

 

LEONIDE
Es-tu si délicat ? ne veux-tu pas, mon coeur,
Qu’une mauvaise humeur quelquefois ne me vienne ?
Et puis j’avais désir de connaître la tienne.
Cette petite fougue où je viens de te voir,
Bien souvent sur nos coeurs a beaucoup de pouvoir.
Nous voulons posséder pour être possédées,
Mais aussi quelquefois un peu gourmandées.
L’amour en est plus grand ! Mais changeons de propos
Et pensons seulement à nous mettre en repos.

 

ARBIRAN
Tes yeux ont tant d’attraits, ta grâce a tant de charmes,
Qu’il faut que je me rende et mette bas les armes.
Que ce sexe, grand dieux, a de pouvoir sur nous !

 

LEONIDE
Tâchons, je te supplie, à tromper ce jaloux.
Je veux parler du roi, qui s’efforce à me plaire.
Mais son amour me fâche et me met en colère.
Dis-moi, que ferons-nous pour rompre son dessein ?

 

ARBIRAN
Ne tient-il qu’à lui mettre un poignard dans le sein ?
Ce sera bientôt fait.

 

LEONIDE
Que j’en serais ravie.

 

ARBIRAN
Tiens pour certain qu’il est déjà privé de vie.
Ma main fera ce coup, ou bien je périrai.

 

LE ROI
Traître, si je le puis, je t’en empêcherai.
Amis, saisissez-vous de ce monstre exécrable !
A-t-on jamais rien vu de plus abominable ?

 

ARBIRAN
Ah ! Dieu, je suis trahi, méchante, tu me perds.
(V, 7-8)

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