L’honneur de contredire

« Et ne faut-il pas bien que Monsieur contredise ?
À la commune voix, veut-on qu’il se réduise ?
Et qu’il ne fasse pas éclater, en tous lieux,
L’esprit contrariant, qu’il a reçu des cieux ?
Le sentiment d’autrui, n’est jamais, pour lui plaire,
Il prend, toujours, en main, l’opinion contraire ;
Et penserait paraître un homme du commun,
Si l’on voyait qu’il fût de l’avis de quelqu’un.
L’honneur de contredire, a, pour lui, tant de charmes,
Qu’il prend, contre lui-même, assez souvent, les armes ;
Et ses vrais sentiments sont combattus par lui,
Aussitôt qu’il les voit dans la bouche d’autrui. »
Le Misanthrope, II, 4, v. 669-680

L’attitude du contradicteur systématique est présentée comme contraire au savoir-vivre mondain

– au troisième livre (1657) de la Clélie des Scudéry (1)
– dans le traité de Nicolas Faret L’Honnête Homme ou L’Art de plaire à la cour (1630) (2).

 

Elle est propre au caractère opiniâtre selon la description qu’en donne La Mothe le Vayer (voir « hors de son sentiment on n’a pu l’entraîner »).

 

 


 

(1)

– Je m’offre à l’heure même à soutenir que la complaisance est la meilleure, la plus agréable, la plus commode, et la plus nécessaire qualité qu’on puisse avoir. En effet, comparez un peu cet homme qui ne dit jamais non, à un autre que je connais qui ne dit jamais oui, qui dispute toujours, qui contredit tout le monde, qui cesse de vouloir ce qu’il veut dès qu’un autre le veut comme lui, qui quitte ses propres sentiments dès qu’il est venu à bout de les persuader à quelqu’un, de peur d’être de l’avis d’un autre, et qui chasse enfin de toutes les conversations où il se trouve la paix et les plaisirs par son opiniâtreté à disputer contre tous ceux qu’il rencontre.
(Clélie, III, 2, p. 727-728)

 

(2)

Jamais il [le turbulent] ne sait fléchir à propos, et s’est tellement assujetti à ses humeurs, et à ses opiniâtretés, qu’il s’imagine que tout ce qui les contrarie ne peut être conforme au bon sens. […]aussi un habile homme s’y prend bien d’un autre air, et n’a garde de se rendre si fort esclave de ses inclinations, qu’il ne puisse en tout temps les faire ployer sous celles de la personne à qui il aura envie de se rendre agréable. Cette souplesse est l’un des souverains préceptes de notre art. […] Il y a du rustique et du stupide, d’être tellement pris à ses complexions, qu’on ne puisse jamais en relâcher un seul point. Un esprit bien fait s’ajuste à tout ce qu’il rencontre.
(L’Honnête Homme p. 167-169)

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