La campagne de Flandre dans les Continuateurs de Loret en 1668

La campagne de Flandre est menée durant les mois qui précèdent la création d’Amphitryon. La comédie de Molière fait plusieurs allusions subtiles à ce contexte.

 

Le reflet des épisodes militaires qu’offrent les gazetiers nous permet de saisir à quel point ces circonstances sont présentes à l’esprit du public de Molière.

 

 

Lettre du 7 janvier 1668, par Robinet.

 

-La guerre (de dévolution) reprend sporadiquement dans la Flandre :

Malgré la Saison Hyémale,
Qui semble aux beaux Exploits fatale
Et contraindre les plus Guerriers
De demeurer dans leurs Quartiers,
Le FRANCOIS, qui de sa nature,
Se fixe moins que le Mercure,
Agit sans cesse aux PAYS-BAS,
Quoi que cela ne plaise pas
Aux soldats du Seigneur Ibère,
Qui sont de plus grave matière.
Vous saurez donc que de MONTAL,
Qui gouverne le FORT-ROYAL, [Le Fort de Charleroi.]
Ayant appris que trente Braves,
Bien montés et garnis de Raves,
Étaient allés, ce disait-on,
Fortifier la Garnison
D’un Château proche de BRUXELLE, [Le Château de Genap.]
Et qu’à des Jeux de Bagatelle,
Pour tuer le Temps, tout le Jour
Ils s’ébaudissaient dans le Bourg,
Détacha soixante bons Maîtres,
Et non de simple Traîne-guêtres,
Pour aller, de leurs propres mains,
Les enlever comme Corps Saints.
MAZEL, qui conduisait la Troupe, [Commandant de la Cavalerie en ce Fort de Charleroi.]
Eut tellement le vent en poupe
Qu’il en enleva six d’abord,
Et puis quelques autres encor ;
Et, le reste ayant pris la Fuite,
Maint y mourut de mort subite,
Étant, en Achilles, blessés
Par le Talon, non pas le nez.

 

Le Sieur Gouverneur de ce Poste,
Étant accouru, comme en Poste,
Pour recoure les Enlevés,
Lesquels faisaient les endevés,
Fut dans une surprise extrême
De se voir enlever lui-même ;
Et Mazel, après ce beau coup,
Duquel il fut loué beaucoup,
Revint encor, gagnant l’estrade,
Faire à NAMUR une Algarade,
Allant jusques au Pont-Levis
Faire de courageux Défis ;
Mais, quoi qu’il y chargeât des Drilles,
Ses efforts furent inutiles,
Et la tranquille Garnison
Ne montra rien qu’un coeur d’Oison.

 

Au reste, à MADRID l’on travaille
À faire un beau Fonds de clinquaille
Pour de militaires Apprêts,
Car cela revient à grands frais ;
Mais là les Bourses sont si vides
Et les Sources d’argent arides,
Que les Ministres, pour le sûr,
Tireraient de l’huile d’un Mur
Plutôt (ou qu’on me décapite)
Qu’ils n’en tireraient une Pite ;
Ainsi, je les tiens bien niais
De ne pas conclure la Paix
Au plus vite avecque la FRANCE,
Pour éviter telle Dépense.

 

 

Lettre du 4 février 1668, par Robinet.

 

-Après avoir évoqué la guerre de Candie, Robinet revient sur la Campagne de Flandre :

Si l’Espagnol était bien sage,
À peu près en pareil langage,
Tout plein de coeur et plein d’esprit,
Il haranguerait dans Madrid,
Et dirait au Conseil d’Espagne,
Avant qu’on ouvre la Campagne,
Car lors il ne serait plus temps :
 » Messieurs, s’il vous reste du sens,
 » Savoir du bon et du solide,
 » Qu’il vous serve aujourd’hui de guide
 » Dans vos Délibérations
 » Et dans vos Résolutions
 » Touchant la Guerre avec la France,
 » Et, voyant le peu d’apparence,
 » Avecque tous vos grands Apprêts,
 » D’y pouvoir borner les progrès
 » D’un ROI favori de la Gloire,
 » Qui traîne partout la Victoire ;
 » Que, d’autre part, le Portugal
 » Dessus ce point nous est fatal,
 » Et que notre Roi Catholique
 » Est de finance famélique,
 » Fort nécessaire pour les Frais
 » De tous ces belliqueux Apprêts,
 » Ne se trouvant pour nous que blanque
 » Dans toute Bourse et tout Blanque,
 » Sur ces raisons et ces motifs,
 » Sans être à contretemps rétifs,
 » Satisfaites notre PARTIE,
 » Qu’on voit déjà si bien nantie,
 » Et, de par Dieu, ne souffrez pas
 » La perte de nos Pays-Bas.  »

 

Mais bon ! est-ce que je veux rire ?
Qui diantre à Madrid voudrait dire
Les beaux Vers que j’écris ici ?
J’en prends donc pour eux le souci
Et j’adresse cette Apostrophe
À leur Conseil si Philosophe.

 

Mais, d’ailleurs, tous les Potentats,
Les Républiques, les États,
Se vont mêler de cette affaire,
À l’exemple du très SAINT-PÈRE,
Et, selon nos pieux souhaits,
Ils pourront rétablir la Paix,
Assoupissant toute castille
Entre la FRANCE et la CASTILLE.
Cependant, notre grand HÉROS,
Digne, certe, d’un divin los,
A déjà la Puce à l’oreille,
Et sa Valeur, qui se réveille
Au plus fort des Quartiers d’Hiver,
Sans attendre le nouveau vert,
Le tire du sein des Délices,
Du Carnaval les chers Complices,
Et le fait monter à Cheval,
Reprenant son air martial,
Pour des Préludes de Campagne
Qui pourront effrayer l’Espagne.

 

Ce fut Jeudi que ce vrai Mars,
Craint et chéri de toutes parts,
Partit, après un Adieu tendre,
Tel que chacun le peut comprendre,
À la REINE et leur beaux Enfants,
Si pourvus d’Appas triomphants,
Ainsi qu’à vos chères ALTESSES,
Dignes aussi de ses Tendresses,
MONSIEUR étant ici resté,
Par l’ordre de sa MAJESTÉ,
Pour se préparer au Voyage
(Bien glorieux à son Courage)
Qu’en CATALOGNE il fait en bref,
Afin d’être aussi là le CHEF
D’une belle et nombreuse Armée,
Qui sera des mieux animée
Par ses Ordres et par son Bras.
Pour l’Ibère ô quel Embarras !

 

 

Lettre du 18 février 1668, par Robinet.

 

-Nouvelles de Flandre :

Lecteur Curieux de Nouvelles,
En voici vraiment des plus belles,
Qui ne sont point de Carnaval,
De Mariage, ni de Bal,
Mais du fameux Camp de Bellonne,
Où le MONARQUE est en Personne,
Avec le merveilleux CONDÉ,
Dont il est si bien secondé.

 

BESANCON, presqu’à son approche,
Ayant le coeur moins dur que Roche,
A fléchi sous ce Conquérant.
Elle disait en murmurant
Qu’elle était Ville Impériale ;
Mais la Belle devint ROYALE
Aussitôt qu’on lui fit goûter
Que, par le Traité de Munster,
Elle avait cesse d’être telle,
Et, lors perdant tout son faux zèle,
Elle dit, à la bonne Foi :
« Bien, donc, que LOUIS soit mon ROI !  »

 

SALINS, après quelque incartade
De Canon et de Mousquetade,
A, certe [sic.], aussi dit à nos Gens :
« Soyons Cousins, entrez Léans ;  »
Et la seule Ville de DOLE,
Refusant d’être de la GAULE,
Pensait pouvoir régler son Sort ;
Mais, pour montrer qu’elle avait tort,
Un grand Bation, de lui-même,
Tomba, par un respect extrême,
A l’aspect du rare LOUIS,
Dont tous les Faits sont inouïs.
Alors, maint Franc Comtois s’écrie
Que le Prince use de Magie ;
Mais, tandis qu’il s’écrie ainsi,
DOLE se rend, enfin, aussi
À ce MONARQUE, en effet Mage,
C’est-à-dire Monarque sage.
Voilà comment ce Fils des Dieux
Ne fait, comme il veut, en tous Lieux
Qu’aller et que voir et que vaincre.
Si je pouvais rimer en aincre,
J’irais loin sur ce Sujet-là ;
Mais il m’en faut demeurer-là.

 

MONSIEUR, le digne FRÈRE UNIQUE
D’un ROI si grand et si bellique,
Est, belle-erre, allé le trouver,
Afin, tout au moins d’achever
Avec lui mainte autre Conquête,
À laquelle on dit qu’il s’apprête.
Prenez soin, ô Dieux Souverains,
De ces deux si charmants Germains,
Et les conduisez, pleins de gloire,
Sans nul Danger, à la Victoire.
Rien n’est craint par ces Généreux,
Mais nous devons craindre pour eux.

 

 

Lettre du 25 février 1668, par Robinet.

 

-Retour sur la guerre de Flandre :

Mas parlons de Faits Belliqueux
De LOUIS, Favoris des Dieux,
De ce Héros que la Victoire
De tous côtés couvre de Gloire.

 

Nous avons eu avis que GRÉ,
Tant de bon que de mauvais gré,
À son tour a joué le Rôle
De BESANCON, SALINS et DOLE,
Et que chaque Bourg et Cité
De la belle FRANCHE-COMTÉ
Se sont soumis ensuite au PRINCE,
Si que de l’entière Province
Il s’est rendu au SOUVERAIN,
Ainsi que dans un tourne-main.
Voilà de ce ROI Magnanime,
Qui vaut tant d’amour et d’estime,
Le mémorable CARNAVAL,
Digne de son Coeur martial,
Et son Ballet extr’ordinaire,
Où le pauvre SEIGNEUR IBÈRE
A, d’un oeil très moult contristé,
Vu sauter sa FRANCHE-COMTÉ.

 

Mais reparlons de DOLE encore,
Car je serais une Pécore
Et, certes, un vrai Maladroit
SI je passais sur cet Exploit
Comme sur un Exploit vulgaire
Et qui n’eût rien que d’ordinaire.

 

Les Dolois donc, tremblant au coeur,
Pour un peu déguiser leur peur,
Et seulement dire que voire,
Non pour contester la Victoire,
Répondirent fort fièrement
Et sans aucun doux compliment
Au Trompette de notre SIRE,
Envoyé vers eux pour leur dire
Ce qu’on dit pour Sommation
Dedans pareille occasion.
Ce qui soutenait leur audace
Était aussi que cette Place
Leur semblait à couvert de tout
Et capable de mettre à bout,
En cette Saison hivernale,
Toute la Constance Royale,
Par ses Fortifications,
Consistant en gros Bastions,
Garnis, sans nulle erreur au compte,
De cent Sarbatanes de Fonte,
Qui foudroyaient de toutes parts,
En Ravelins, Fossés, Remparts
Et plusieurs Ouvrages à Cornes,
Menaçant de donner des Bornes
Aux Progrès de Sa MAJESTÉ
Dans icelle FRANCHE-COMTÉ,
Ou, du moins, durant la Campagne,
De conserver Dole à l’Espagne.
Mais LOUIS, sûr de ses Destins
Qui couronnent tous ses Desseins,
Après avoir, comme un grand Maître,
Été sur la Place reconnaître,
Méprisant de ses gros sifflets,
Comme rien, les ardents Boulets,
L’un desquels, en Boulet très sage,
Vint choir à ses pieds, par hommage,
Il fit attaquer, au moment,
Et par trois endroits mêmement,
La Contrescarpe, d’une sorte
Que presque à l’instant on l’emporte
Et que l’on y dresse, à souhait,
Un beau Logement fort complet.

 

Alors, de LOUIS la Clémence
Tenant sa Valeur en balance,
Il fit convier derechef,
Sans attendre un plus grand méchef,
Messieurs les Dolois de se rendre,
Afin qu’en Père doux et tendre,
Il put à toute la Cité
Faire ressentir sa Bonté ;
Et de GRAMONT, ce brave COMTE
De qui chacun fait tant de compte,
S’étant chargé de cet Emploi,
En vint à son honneur, ma foi,
Car, s’étant comme un Homme habile,
Enfin introduit dans la Ville,
Malgré des Officiers rebours
Qui, nonobstant ses beaux Discours,
Voulaient, d’une façon felonne,
Canarder sa digne Personne,
Il fit si bien son Compliment
Aux Députés de Parlement
Qu’il vainquit leur petit courage,
Et revint avec un Otage,
Lequel dit à la MAJESTÉ
Qu’on lui remettait la Cité.

 

En général, tous ceux des Gardes,
Où l’on voit peu d’Âme couardes,
Firent voir un merveilleux coeur
En cette Action de vigueur,
Animés par de ROQUELAURE, [Lieutenant Général.]
Fort galant, et plus brave encore.

 

Saint VALLIER et de la FERTÉ
Y firent rage, en vérité,
Dessous le COMTE de GADAGNE [Aussi Lieutenant Général.]
Qui, certes, par un grand Renom y gagne :
Et le Régiment Lionnais,
Se signalant en ce Tournois,
Y parut, je vous le proteste
(Car c’est ainsi qu’on me l’atteste),
Composé de petits Lions,
Échappés des fers et des gonds.

 

CHAMILIS, pour qui cette Ville [Maréchal de Camp.]
Avait paru trop peu civile,
Le laissant morfondre au Filet,
Et, tout franc, garder le Mulet
Sans vouloir, au Nom de GRAND SIRE,
Ouïr ce qu’il avait à dire,
Se souvint fort bien de cela,
Commandant cesdits Lions-là,
Et, par bravoure et par vengeance,
Agit là de belle importance.

 

J’ai su de Gens dignes de foi
Que le MARQUIS DE VILLEROI
Y fit, en Tête, des merveilles
Que l’on peut dire nonpareilles,
Ayant, ainsi qu’un grand Lion,
Enlevé le Drapeau, dit-on,
De dessus une Demi-Lune,
Que, par double bonne fortune,
Il emporta pareillement
Tout à fait intrépidement.

 

Le charmant MARQUIS DE FOURNILLES,
Assez aimé des belle Filles,
Ne faisant pas là le Coquet,
Y reçut un coup de Mousquet,
Dont on l’a fait mourir en Proe :
Mais, ayant mieux appris la chose,
Lorgnant la Parque de travers,
Moi, je le ressuscite, en Vers,
Pour ces Beautés, pleines de charmes,
Qui le pleuraient à chaudes larmes,
Et je promets à leurs Appas,
En un mot, qu’il n’en mourra pas.

 

CASTELLAN, selon les Oracles,
Ne fit aussi que des miracles,
Et l’on sait trop pour en douter
Qu’en Guerre il se fait redouter
Et qu’il est digne de sa Charge,
Et tout du long et tout du large.

 

Tous les Aides de Camp du ROI
Ni firent pas, en bonne foi,
Comme l’on dit, le SI derrière
En cette honorable Carrière ;
Mais tous y servirent très bien,
Et croyez en l’Historien.
Entre autres cent Biens l’on raconte
D’un aimable et belliqueux Comte,
Lequel Comte, très renommé,
Le COMTE D’AUVERGNE est nommé ;
Et, vraiment, il est d’une Race
Où règne fort le Dieu de Thrace.

 

Et le MARQUIS de BÉRINGHAN
Y perdit le Pouce d’un Gant,
Par l’assez plaisante incartade
D’une bizarre Mousquetade
Qui, sans lui faire d’autres torts,
Lui traversa le Juste-au-corps.

 

Chacun, en un mot, devant DOLE,
S’acquitta fort bien de son Rôle,
À l’Exemple du Grand CONDÉ
Y parut, à son ordinaire,
Un admirable Militaire,
Volant, ainsi qu’un vice-Mars,
Aux plus redoutables Hasards.

 

D’ENGUYEN, qui ce Héros retrace,
Le suivait illec à la Trace,
Et d’ause ne se sentait pas
De pouvoir enfin, sur ses pas,
Apprendre l’Art de la Victoire,
Et comme on se couvre de Gloire.

 

Mais LOUIS, ce Franc demi-Dieu,
Se transportant en chaque Lieu,
Faisait par la belle Déesse
Couronner le coeur et l’adresse
De tous ceux qui se signalaient,
Et c’est par lui qu’ils triomphaient.

 

Le beau Premier MONSIEUR de FRANCE,
D’une si brillante Apparence,
PHILIPPE, le digne GERMAIN
De cet auguste SOUVERAIN,
Transporté de la même Flamme,
Que Mars allume en sa belle Âme,
Était, malgré l’infirmité
Où se rencontrait sa Santé,
Allé joindre ledit beau SIRE ;
Mais, las ! (dont encor il soupire)
Il apprit dessus le chemin
Qu’il mettait la dernière main
À sa merveilleuse Conquête ;
Ainsi, non sans martel en tête,
Il revint en cette Cité
Et, Vendredi, Sa MAJESTÉ
Arriva, triomphante et gaie,
Au Château Saint Germain en Laye,
Où toute la Cour, d’un bel air,
Pourra bien d’aise encor baller.

 

 

Lettre du 3 mars 1668, par Robinet.

 

-Gloire à Louis le Grand, vainqueur de la Flandre :

Notre Victorieux MONARQUE,
Qui conduit la Gauloise Barque
Comme un Pilote très expert,
Qu’on ne saurait prendre sans vert,
A de maints habiles Langues
Ouï les fluides Harangues,
De par tous les Corps de Thémis,
Qui, de l’Équité même,
Audit GRAND PORTE-DIADÈME
Été tenir de doux Propos,
Qui contenaient un juste Los
Touchant sa Conquête, non mince,
De toute la grand Province
Qu’on nomme FRANCHE-COMTÉ.
Mais, Ciel ! qui n’en a pas conté
À ce POTENTAT magnanime,
Ou soit en Prose ou soit en Rime,
Sur un Sujet si glorieux,
Les uns moins bien, les autres mieux,
Les uns en transcendante Phrase,
Ampoulée et pleine d’Emphase,
Les autres, aimant le plein pied,
En style trop humilié ;
Les uns par Sonnets et par Odes,
Comme il leur semblaient plus commodes,
Les autres par des Virelais,
Madrigaux ou Madrigalets ;
Ceux-ci par des Rondeaux ou Stances,
Dont ils aiment mieux les Cadences.
Ceux-là par de jolis Quatrains,
Ou, tout au plus, par des Sizains,
Ne voulant pas que de leur Veine
On vit des Vers à la Douzaine ;
Ceux-ci, feignant des Visions
Dans leurs Versifications ;
Les uns faisant des Dialogues
Et les autres des Monologues,
Selon qu’ils ont l’instinct porté
Pour le Nombre, ou pour l’Unité ;
Ceux-ci, plus fiers que des Pompées,
S’expliquant par Prosopoppées,
Et chacun croyant que Phébus,
Quoi que peut-être avec abus,
A le mieux secondé son zèle,
Et qu’il tire après lui l’Échelle ?
Pour moi, qui suis minime Auteur
Et l’humilime Serviteur
De ces huppés Faiseurs de Rimes
Qui vont dans les Routes sublimes,
Je ne puis à notre HÉROS
Rien présenter, sur son grand LOS,
Que mes Vermisseaux faméliques,
Et tout simplement Historiques,
Qui narrent ses glorieux Faits,
D’ailleurs, qu’est-ce que l’on peut dire
Qui soit digne un peu d’un tel SIRE ?

 

Quels Noms peut-on donner désormais à Louis
Qui ne soient au-dessous de sa sublime Gloire ?
Ceux de tous les Héros qui nous ont éblouis
Par l’éclat qu’on leur donne au Temple de Mémoire,
Ces noms, dis-je, si grands, ces Noms si glorieux,
Révérés jusqu’à nous, comme des Noms de Dieux,
Sont en vain soutenus de tant de Renommée,
Et l’éclat des Exploits du Potentat des Lys
Ne nous laisse plus voir qu’une épaisse Fumée
Où ces Noms sont éteints et comme ensevelis.

 

Ho, ho ! quoi ? je sors du Lyrique
Et je donne dans l’Héroïque ?
Arrêtons, ce n’est pas mon fait ;
Mais, en notre petit caquet,
Insérons encor dans le Rôle
Que nous avons dressé de DOLE,
Qui s’est rendu sincèrement,
Par un Arrête du Parlement,
Ce que dans ma dernière Lettre,
Faute d’avis, je ne pus mettre,
Car il faut enfin jusqu’au bout,
Clion, rendre compte de tout.

 

D’ESPIAITZ, Homme de conséquence,
Ayant aux Gardes Lieutenance,
Y mourut dans le Lit d’Honneur,
S’y faisant voir rempli de coeur ;
SANDRICOURT, en ce Corps Enseigne,
Qui nulle part du nez ne saigne,
S’y sentit blesser au Nombril
De coup de Mousquet ou Fusil ;
DU RANCHER, Capitaine au Gardes,
N’étant pas là dessus ses gardes,
Dans sa Cuirasse en reçut deux,
Si violent et si fougueux
Qu’ils firent, comme une Tempête,
Choir son Habillement de Tête ;
Et de SAINT GRATIAN CATINAL,
Personnage fort martial,
Montrait lors sa Bravoure extrême,
Ce dit-on, à son côté même.

 

Dans cette Action, BONVISI,
Lequel est preux en cramoisi,
N’eût, vrai comme le jour m’éclaire,
Qu’une contusion légère.
GIMAR, Lieutenant Colonel,
Y reçut un coup solennel,
C’est-à-dire coup d’importance
Et dangereux, en conscience.
Les Sieurs de VALORGE et DUMÉ,
Chacun de Bellone enflammé,
Eurent de même une blessure
D’une très difficile Cure.

 

Mais quoi ? des Vaillants trépassés
Et pareillement des blessés
Le nombre irait plus loin encore,
Si le MONARQUE qu’on adore,
Prenant soin de nos Assaillants,
Qui quelquefois sont trop bouillants,
N’eût par des Défenses sévères
Arrêté court les Volontaires.

 

Le célèbre de ROANNEZ,
Qui sait bien plus que son Donez,
Signalant-là ses Gentillesses,
Que l’on peut bien nommer Prouesses,
Comme il vit que Sa MAJESTÉ,
Avec trop d’intrépidité,
S’exposait à toute Disgrâce,
A découvert, proche la Place,
Tandis que l’on préparait tout
Afin de la réduire à bout,
Alla vite, à Bride abattue,
L’Âme d’inquiétude émue,
Faire sortir d’un prochain Fonds
Une Troupe de Champions,
Pour détourner les Ambassades
Des meurtrières Mousquetades
De dessus ce ROI généreux,
Et les attirer devers eux.

 

Le Sieur COMTE DE SAINTE-MÊME
(De quoi, je pense, il parut blême)
Eut Balle en bouche, par l’effet
D’un sinistre coup de Mousquet,
Dont il tombait lors, pêle-mêle,
Une fort massacrante Grêle
À l’entour du grand DE CONDÉ,
Allant, comme un Mars dégondé,
Visiter l’une des Attaques,
Ainsi que moi, Charle, et non Jacques,
J’irais au Bal ou bien Ballet,
Car, ailleurs, je suis son Valet :
Je ne suis point né pour la Guerre,
Et j’aime la Paix sur la Terre.

 

Voilà, si je ne suis trompé,
Ce qui pouvait m’être échappé,
Touchant la Doloise matière,
Dedans ma Missive dernière,
Si ce n’est encore ceci,
Qui vaut bien le noter aussi,
C’est que notre MONARQUE,
Qui des mieux les Braves remarque,
A donné le Gouvernement,
Ou du moins le Commandement
De DOLE au COMTE de GADAGNE,
Qui Biens et Gloire en cela gagne,
Et que Messieurs du Parlement
Haranguèrent civilement,
En Robes rouges, ce GRAND SIRE,
L’admirant comme l’on admire.

 

Cependant, le CHÂTEAU de JOUG
Fut aussi mis dessous le joug,
Ainsi que celui de Sainte ANNE,
Par un Vaillant, ou Dieu me damne,
Et c’est MAUPEOU, qui de SALINS
Gouverne les chers Citadins,
Comme VILLARS gouverne encore
Ceux de BESANCON, que j’honore
SI, pour le plus charmant des Rois,
Ils parlent toujours bon Français.

 

Comme toutes les autres Places
Avaient choisi ses bonnes Grâces,
Et qu’il ne restait plus que GRÉ
À vaincre de force ou de gré,
Pour avoir enfin dans sa Manche,
Toute la belle COMTÉ-FRANCHE,
Il résolut, et franc et net,
De l’attaquer à cet effet.

 

Mais, sitôt qu’on en fit la mine,
Sans que cette Cité s’obstine,
Son Gouverneur, nommé LULLINS,
La remit aussi dans nos Mains,
Et je crois, pour tout dire en somme,
Que l’on y perdit, au lieu d’Homme,
Qu’un Cheval de Sa MAJESTÉ,
Par le Sieur BOISSERET monté,
Allant lorgner la Contrescarpe,
Où nul ne jouait de la Harpe,
Ayant, quant à lui, sans méchef,
Depuis les pieds jusques au Chef,
Essuyé les belles sifflades
De dix ou douze Mousquetades.

 

Ce sont-là les heureux Progrès
D’un ROI qui partout fait florès,
ID EST, que la belle Victoire
Suit partout, avecque la Gloire,
Qu’il aime plus que les Plaisirs
Qui d’autres font tous les Désirs.

 

Ayant mis ma chemise blanche,
Je l’allai voir aussi, Dimanche,
Et je pensais bien mêmement
Lui faire un joli Compliment ;
Mais, voyant son auguste Face,
Je n’en eus pas l’honnête audace :
Par son éclat il m’éblouit,
Et la parole il m’interdit,
Si bien qu’après avoir dit : « SIRE,  »
Ne sachant plus du tout que dire,
En lui présentant mes Papiers,
Qui contenaient ses Faits guerriers,
Je dis : « ô Monarque céleste,
« Voici qui vous dira le reste.  »

 

Ensuite ayant bien festiné
Et chez Son ALTESSE dîné,
Bonne foi, tout du long de l’aune,
Grâce à l’Obligeant de SURAUNE,
Et salué l’illustre IRIS,
Je revins, le soir, à Paris,
Par une bien douce Aventure,
En belle et royale Voiture,
Avec une aimable Beauté
Dont mon oeil était enchanté,
Un Arion, ou franc Orphée,
Dont mon Oreille était charmée,
Bref, un Poète, un Orateur,
Un Naturaliste, un Docteur
Et, qui plus est, un Philosophe.
Mais la charmante ST-CHRISTOPHE, [Femme de Chambre de Madame.]
Admirable, et même au-delà,
Me représentait tout cela
Dans sa Personne singulière,
Qui n’est qu’Esprit, flamme et lumière,
Qui vous ravit par ses beaux Airs,
Ou par le récit de ses Vers,
Car joliment elle en compose
Et de tout parle en belle prose,
Avec un air, avec un tour,
Qui pour elle remplit d’amour.

 

 

Lettre du 10 mars 1668, par Robinet.

 

-Flandre :

Vous, MADAME, qui savez tout
De l’un jusques à l’autre bout,
Vous savez de la Grande Troie
La Guerre, dont l’Idée effraie,
Et qui se fit si chaudement
Pour l’amoureux Enlèvement,
Par PARIS, de la Dame HÉLÈNE,
Action, certe [sic.], un peu vilaine.
HÉROÏNE pleine d’Appas,
J’ai su que, pour un autre cas,
Il est arrivé grande Noise,
À TROYE aussi, la Champenoise :
C’est que l’auguste MAJESTÉ,
Ayant, en ladite Cité,
Au retour de sa COMTÉ-FRANCHE,
Fut ce jour ouvrable ou Dimanche,
Été harangué, comme ailleurs,
Par l’un des Principaux Messieurs,
Un autre qui point ne harangue,
Ni peu ni prou, dans notre Langue,
S’est pourtant donné, ce dit-on,
La gloire de cette Action,
Et l’a fait, en style authentique,
Mettre dans la Prose Historique.

 

Or le véritable Orateur,
Se plaint de cet Usurpateur
Du beau succès de son Bien dire,
Dont notre Victorieux SIRE
Témoigna, très obligeamment,
Être satisfait pleinement ;
Ce qui cause, en icelle Ville,
Ainsi qu’une Guerre civile.
Mais les Suites l’on en craint peu,
N’a rien de la Flamme Grégeoise,
Qui ne laissa pas une Ardoise
Ni même une Late, dit-on,
De l’infortunée ILION.

 

-Offres de médiation :

Disons, à propos de Harangue,
Que naguère, en Latine Langue,
L’AMBASSADEUR du ROI BRETON,
Aussi sage que feu Caton,
Celui des grands ÉTATS BELGIQUES,
Dessus la Mer Gens fort belliques,
Et divers autres Orateurs
Envoyés par les ÉLECTEURS,
Et par les PRINCES de l’Empire
Ont harangué notre dit SIRE,
Touchant la Médiation
Que les uns, par précaution
Et par une prudence extrême,
Je crois, pour leur intérêt même,
Font offrir à Sa MAJESTÉ,
Et les autres, par charité
Envers la malheureuse ESPAGNE,
De crainte qu’en cette Campagne,
Par un second coup de Filet,
Elle ne perde tout à fait,
Pour le moins encore, la FLANDRE,
Sans jamais y plus rien prétendre.

 

Il est vrai qu’il n’est que la Paix
Qui soit capable désormais
D’empêcher son entier naufrage
Dedans ce martial Orage.

 

On dit qu’avec le PORTUGAL
(Je ne sais si c’est On dit mal)
Elle l’a déjà résolue
Et même pleinement conclue,
Nonobstant ses Prétentions,
Sous de telles Conditions
Qu’on l’a désiré dans LISBONNE.
Sa Politique est belle et bonne ;
Mais cela ne sauvera pas
De nos Exploits les Pays-Bas,
Ni mêmement la Catalogne,
Et c’est un Conte à la Cigogne
De dire que par ce moyen
Elle n’ait plus à craindre rien.

 

À la fin, Dom JUAN d’AUTRICHE,
Après avoir cent fois dit briche,
Se résout, sur certains Appas,
À passer dans les Pays-Bas,
La REINE RÉGENTE Espagnole
Lui donnant, ce dit-on, parole
Que là rien ne lui manquera,
Que le Pérou s’y répandra,
Et qu’il aura, bref, une Armée
Qui, jointe avec sa Renommée,
Le rendra sans doute en tous Lieux,
Triomphant et Victorieux.
Pour l’Armée et pour la Finance,
Il peut, s’il veut, donner créance
À Sa Régente Majesté,
Comme à la propre Vérité ;
Mais, pour le reste, ou que je meure,
Je voudrais Caution meilleure,
Et cela se peut dire mieux
De notre Héros glorieux.

 

 

Lettre du 14 avril 1668, par Robinet.

 

-Colbert, au nom du Roi, fait la paix avec l’Espagne :

Comme lui, tous les autres Princes,
Et les plus grands et les plus minces,
Continuent de faire effort
À les remettre bien d’accord,
Et, pour décider la Querelle,
Ils envoient dans Aix-la-Chapelle
Des Gens de bon Entendement,
Qui savent agir prudemment
Et sont, pour les grandes Affaires,
Pourvus des Clartés nécessaires.

 

LOUIS, qui n’y répugne pas,
Quoi qu’il soit charmé des Appas,
De la Guerre et de la Victoire,
Qui partout consomme sa Gloire,
A fait choix de l’UN des COLBERTS, [De M. Colbert, Maître des Requêtes.]
Qui, comme on sait, sont des Experts,
Avecque le beau Caractère
D’Extr’ordinaire Ambassadeur,
Qu’il soutient avecque splendeur.

 

J’ai su que ce Ministre sage
En tous les lieux de son Passage
A reçu de beaux Compliments
Et d’honorables Traitements,
Mais notamment à Charleville ;
Car, là, de façon bien civile,
Monsieur le PRÉSIDENT MOREL,
Qu’on tient pour habile Mortel,
Lui fit, en la Française Langue,
Une très diserte harangue,
Et le Sieur COLLART, mêmement,
Le traita fort splendidement,
Dedans son propre Domicile,
L’un des plus beaux d’icelle Ville,
Qu’on avait pour lui préparé,
Et dont à l’Hôte il sut bon gré.

 

-Corneille et Bensérade se trouvent impliqués dans le panégyrique de la victoire contre l’Espagnol :

Mais, tandis qu’ainsi l’on travaille,
Comme l’on dit, vaille-que-vaille,
À faire un chemin à la PAIX,
Je vois partout certains Apprêts
Qui ne nous chantent que la GUERRE,
Tant dessus l’Eau que sur la Terre ;
Et celle-ci, pour dire tout
De l’un jusques à l’autre bout,
Est si favorable au MONARQUE
Qui conduit la Gauloise Barque,
Qu’il paraîtrait bien modéré
S’il quittait à présent le Dé,
Car on voit comment la Victoire
Prend plaisir d’augmenter sa Gloire,
En toutes Saisons, en tous Lieux,
Au-delà même de ses Voeux.
Quels Vainqueurs… Mais, tout beau, ma Muse,
N’enflez pas votre Cornemuse
Sur le Sujet des grands Exploits
De ce plus éclatant des Rois ;
Il faudrait être Camarade
D’Apollon, comme BENSÉRADE,
Qui, dans ses Songes, mêmement
En parle si triomphamment,
Ou bien, encor, être CORNEILLE,
Qui là-dessus, a fait merveille,
Ou bien enfin un du PERRIER,
Digne de l’immortel Laurier,
Dont la belle Muse Latine,
Tantôt forte, tantôt poupine,
A su, dans deux Genres divers,
Si bien tourner ses graves Vers.

 

 

Lettre du 21 avril 1668, par Robinet.

 

-En route pour signer la paix, le roi d’Autriche s’est vu retenu par la fièvre :

Le brave Monsieur JEAN D’AUTRICHE,
Par une Fièvre qui le triche,
S’est vu repris, comme on l’écrit,
Ainsi qu’il parait de MADRID
Pour venir prestement en FLANDRE :
N’est-ce pas un fâcheux esclandre ?

 

Mais cette Fièvre-là, je crois,
Qui le met en tel désarroi,
Lui vient de la crainte, sans doute,
De rencontrer dessus sa route
Notre preux et hardi BEAUFORT,
Et de n’être pas le plus fort.

 

-Un comète donne des inquiétudes à propos de la guerre :

On fait mention d’une Comète,
A longue Queue et grosse Tête,
Qui, se pavanant par les Cieux,
S’est fait donner en divers lieux
Des mille millions d’oeillades,
Dont maints yeux ont été malades.
Il a paru, ce m’a-t-on dit,
Notamment à ROME et MADRID ;
Mais comme son affreuse Queue,
Jaune, noirâtre, verte et bleue,
Sur la dernière s’étendait
Et son beau Palais regardait,
On en craint, dessus ma parole,
Dedans cette Ville Espagnole,
L’effet plus mauvais que bénin,
Car à la Queue est le Venin.
Mais, pour savoir qui son Présage
Semble menacer davantage,
Ou la PAIX, ou son jeune ROI,
Je suis trop peu savant, ma foi ;
Et, si de bond et de volée,
J’en dégoisais ma ratelée,
On pourrait me donner le nom
D’un Astrologue de Meudon.

 

J’aime mieux dans mon Paragrapge,
En style d’Historioraphe,
Narrer ce qu’on dit désormais
De ladite future Paix
Et de la Guerre, son contraire,
Dont chacun jase à sa manière,
Et, bien souvent, selon les voeux
Qu’il a faits pour l’une des deux.

 

L’un donc, selon cette Maxime
(Suivant l’intérêt qui l’anime),
Soutient que la Paix l’on aura,
Et l’autre dit que non fera ;
Le Guerrier conclut pour la Guerre,
Le Pacifique en dit Lanlère,
Et conclut aussi pour la Paix ;
Et sur le Car, le Si, le Mais,
Roulent, dedans cette rencontre,
Autant le Pour comme le Contre.
Pour moi, raisonnant juste et sûr,
Sans que j’avance rien d’absur,
Je soutiens, et voyez si j’erre,
Qu’on aura la Paix ou la Guerre.

 

Quoi qu’il en soit, il est certain
Qu’à l’oeuvre on va mettre la main
Dans la VILLE D’AIX-LA-CHAPELLE,
De façon vigoureuse et belle,
Pour rappeler ici, des Cieux,
La Paix parmi nos DEMI-DIEUX.

 

Notre PLÉNIPOTENTIAIRE,
Plein de sagesse et de lumière,
Le Frère de MONSIEUR COLBERT
Qui l’ÉTAT si dignement sert,
Est arrivé là, le septième,
Par une diligence extrême,
Ayant reçu de tous côtés,
Dans les Bourgs, Villes et Cités,
De FRANCE, D’ESPAGNE, et d’HOLLANDE,
Presque l’Encens et la Guirlande
Qu’on doit à l’Ange de la Paix,
Tant, par des transports non suspects,
On a fait, en ma conscience,
D’honneurs à sa digne Excellence,
Qui de chacun gagne le coeur
Aussi par sa rare douceur
Et, sans que je dise des fables,
Par son humeur des plus affables.

 

Or, suivant les Lettre du dix,
Et croyez ce que je vous dis,
Il n’avait point fait son Entrée,
L’ayant, ce dit-on, différée
Jusqu’à ce que tous les Apprêts
Pour cet effet-là fussent prêts,
Où l’on a pu voir, d’assurance,
En relief la Magnificence,
Car j’en ai vu de mes deux yeux
Un Carrosse si radieux
Et dedans et dehors si leste,
Qu’on aurait dit du Char céleste,
Où le brillant Flambeau du Jour
Fait son oblique et vaste tour.

 

 

Lettre du 28 avril 1668, par Robinet.

 

-La paix donne matière au divertissement :

C’est de la sorte désormais
Que la Cour va faire florès
Et se réjouir d’importance
Dans ses beaux Palais de Plaisance ;
Désormais, dis-je, que la Paix
Va remontrer ses chers Aspects
Et faire détaler Belonne
D’entre les DEUX PORTE-COURONNE ;
Car, déjà, la Trêve tient lieu
De cette chère Paix de DIEU,
Notre MONARQUE magnanime,
Si digne d’amour et d’estime,
L’ayant, malgré tout son grand coeur
Et son beau Titre de Vainqueur,
Accordée à son bon Compère,
Qui, comme on sait, est le SAINT-PÈRE.

 

-Les Espagnols auraient-ils tenté de faire un coup de main sur Bellegarde, en Roussillon, alors qu’à l’opposé on signe la paix ?

En achevant ce bel Article,
Un Quidam, qui porte Bezicle,
M’apprend que Monsieur l’ESPAGNOL,
Qui souvent chante par Bémol,
Pensait, d’une Mine hagarde,
Prendre, naguères, BELLEGARDE,
Château fort que nous possédons,
Sur les Montagnes ou les Monts
Qui séparent, comme des Bornes
(Élevant vers le Ciel leurs Cornes),
La Catalogne, ce dit-on,
D’avecque le beau Roussillon,
Comme aussi de mettre en sa Manche,
Et FORMIQUIERS et VILLE-FRANCHE ; [Dans Conflans et le Créqui.]
Mais que le vigilant FOUCAULT,
Rendant l’Espagnol fort penaud,
L’a fait retirer au plus vite,
Ainsi qu’un Lièvre, dans son gîte.

 

 

Lettre du 6 mai 1668, par Robinet.

 

-Suite de la conclusion de la Paix par Colbert :

Mais je pense ouïr Lecteur
Me crier de belle hauteur :
 » Hé, Monsieur, laissez-là ces Belles,
 » Et dites-nous quelques nouvelles !  »
Avec donc leur Permission,
Je passe à la Narration
De ce que la Dame emplumée
Que l’on nomme la Renommée
Nous a PRIMO rapporté d’AIX, [d’Aix-la-Chapelle.]
Où l’on ne discourt que de Paix.

 

Notre PLÉNIPOTENTIAIRE,
Si digne de son Caractère,
A fait, en bonne vérité,
Son Entrée en cette Cité,
D’une façon si piaffante,
Si pompeuse et si triomphante,
Qu’on jugeait à si bel arroi
Qu’il était Ministre d’un ROI
De qui la Gloire est sans seconde,
Soit sur la Terre, soit sur l’Onde.

 

Ailleurs, j’ai parlé de

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