Garder chez soi une grande somme d’argent

« Certes, ce n’est pas une petite peine que de garder chez soi une grande somme d’argent; et bienheureux qui a tout son fait bien placé, et ne conserve seulement que ce qu’il faut pour sa dépense.  »
L’Avare, I, 4

L’anxiété de l’avare surveillant son trésor est un lieu commun de la littérature morale :

 

– dans La Doctrine des moeurs (1646) de Gomberville :

Comme si ce n’était pas assez des craintes et des soins, dont les avares sont tourmentés, toutes les fois qu’ils hasardent leurs biens, il le sont encore des démons familiers qui habitent leurs cabinets et leurs coffres, et qui les tiennent continuellement dans l’appréhension de perdre l’argent qu’ils ont enfermé sous cent clefs. Ces misérables passent d’une inquiétude à l’autre, d’un trouble étranger à un trouble domestique
( p. 51.)

 

– dans l’Iconologie (15) de Ripa :

Disons encore que si quelque chose fait pâlir un homme avare, c’est l’appréhension qu’il a que son bien ne diminue. Ce qui lui donne si fort l’alarme qu’il ne rencontre jamais une parfaite assurance en autrui, tant s’en faut qu’il la puisse trouver en soi-même.
( p. 32.)

 

– dans le sermon « Sur l’avarice » de Claude Joly (1610-1678), curé de la paroisse parisienne de Saint-Nicolas-des-Champs, proche de Foucquet, appelé au chevet de Mazarin lors de son agonie :

J’aime tant l’argent et j’en amasse le plus que je puis, mais en suis-je plus heureux ? est-il vrai que les richesses rendent la vie naturelle plus heureuse ? en suis-je plus fort, en suis-je plus gai, et ai-je plus de santé ? mon sommeil en est-il plus tranquille ? en ai-je plus d’appétit ? Point du tout.
(Sermon XCII, Sermons de M. Joly, évêque d’Agen, 1702, in Collection intégrale et universelle des orateurs sacrés publiés par l’abbé Migne, 1844-1866, t. XXXII, p. 1275)

 

– dans la conversation « De l’avarice » (Conversations morales, 1686) de Madeleine de Scudéry :

L’avare n’aime que la richesse, et est plus ingrat qu’un autre, plus soupçonneux, plus colère; le plaisir même qu’il prend à amasser est toujours accompagné de chagrin, parce que la crainte de perdre ce qu’il a acquis trouble tous les plaisirs de l’avarice.
( p. 707)

 

Dans sa Maison des jeux, Charles Sorel avait reconnu le potentiel ludique de cette situation :

Pour signifier cet autre proverbe, « La défiance est mère de sureté », l’on représentera si l’on veut un avaricieux qui fera mille simagrées pour cacher son argent en lieu sûr, et qui se défiera de tous ceux à qui il parlera, ou qu’il rencontrera, s’imaginant qu’ils ont découvert où est sa cachette, le devinant à leurs gestes, ou à leurs paroles, tellement qu’à toute heure il changera son argent de place, et sera la sentinelle continuellement, sur quoi il se tiendra plus assuré que s’il en s’en éloignait.  »
(t. I, p. 368)(indication aimablement fournie par Christophe Schuwey)

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