Colbert, premier secrétaire d’Etat à la Marine (1669), avait adopté récemment deux mesures favorables au commerce, dans la continuité de la création des deux Compagnies françaises pour le commerce des Indes Occidentales et Orientales (1664) :
– création de ports francs (Marseille, mars 1669) (1)
– édit d’août 1669 permettant à la noblesse de commercer sans déroger (2).
(1)
Edit sur la franchise du port de Marseille, mars 1669
Louis, etc. Comme le commerce est le moyen le plus propre pour concilier les différentes nations, et entretenir les esprits les plus opposés dans une bonne et mutuelle correspondance : qu’il apporte et répand l’abondance par les voies les plus innocentes, rend les sujets heureux et les états plus florissants, aussi n’avons-nous rien omis de ce qui a dépendu de notre autorité et de nos soins, pour obliger nos sujets de s’y appliquer, et le porter jusqu’aux nations les plus éloignées pour en recueillir le fruit et en retirer les avantages qu’il amène avec soi, et y établir partout, en même temps, aussi bien en paix comme en guerre, la réputation du nom français. C’est encore pour l’exécution du même dessein que nous avons donné beaucoup d’application à la construction de quantité de vaisseaux et de bâtiments propres pour le commerce ; que nous avons fait visiter et rétablir les ports, excité nos sujets de se perfectionner à la navigation, convié les étrangers les plus expérimentés d’y concourir, par les grâces que nous leur avons faites : et que même nous avons formé diverses compagnies puissantes pour soutenir la dépense des entreprises nécessaires à cet effet ; et comme les rois nos prédécesseurs ont bien connu les avantages qui peuvent arriver à leurs états par la voie du commerce, et que l’un des principaux moyens pour l’attirer est de rendre quelqu’un des premiers ports de notre royaume libre et exempt de tous droits d’entrée et autres impositions ; la ville de Marseille leur ayant semblé la plus propre pour y établir cette franchise, ils lui auraient accordé un affranchissement général de tous droits […].
(Recueil général des anciennes lois françaises (1821-1833), tome 18, p.205-206)
(2)
Edit portant que les gentilshommes pourront faire le commerce de mer sans déroger, août 1669.
Louis &c. : Comme le commerce, et particulièrement celui qui se fait par mer, est la source féconde qui apporte l’abondance dans les Etats, et la répand sur les sujets, à proportion de leur industrie et de leur travail, et qu’il n’y a point de moyen, pour acquérir du bien, qui soit plus innocent et plus légitime : aussi a-t-il toujours été en grande considération parmi les Nations les mieux policées, universellement bien reçu, comme une des plus honnêtes occupations de la vie civile. Mais quoique les Lois et les Ordonnances de notre Royaume n’aient proprement défendu aux Gentilshommes, que le trafic en détail, avec l’exercice des Arts mécaniques, et l’exploitation des Fermes d’autrui, que la peine des contraventions aux règlements qui ont été faits pour raison de ce n’ait été que de la privation des privilèges de noblesse, sans une entière extinction de la qualité ; que nous nous soyons portés bien volontiers, ainsi que les rois, nos prédécesseurs, à relever nos sujets de ces dérogeances ; que par la coutume de Bretagne et par les privilèges de la ville de Lyon, la noblesse et le négoce aient été rendus compatibles ; et que par nos édits des mois de mai et août 1664, qui établissent les compagnies des Indes orientales et occidentales, il soit ordonné que toutes personnes, de quelques qualité qu’elles soient, y pourront entrer et participer sans déroger à la noblesse, ni préjudicier aux privilèges d’icelle : néanmoins, comme il importe au bien de nos sujets et à notre propre satisfaction d’effacer entièrement les restes d’une opinion qui s’est universellement répandue que le commerce maritime est incompatible avec la noblesse et qu’il détruit les privilèges, nous avons estimé à propos de faire entendre notre intention sur ce sujet, et de déclarer le commerce de mer ne pas déroger à noblesse par une loi qui fût rendue publique, et généralement reçue dans toute l’étendue de notre royaume. A ces causes, etc.
(Recueil général des anciennes lois françaises (1821-1833), tome 18, p.217-218)