Tous ces savantas qui ne sont bons à rien

« Et des gens comme vous doivent fuir l’entretien
De tous ces savantas qui ne sont bons à rien »
Les Fâcheux III, 3 (v. 693-694)

Une des conférences recueillies par Richesource, prononcée au début de l’année 1660, avait été consacrée à la question suivante :

« Quel est le plus propre pour gagner l’estime des dames, le galant, le cavalier ou le savant ? »
(« XIIe conférence de l’Académie française protégée par Monseigneur Foucquet », La Première Partie des conférences…, 1661 p. 113)

 

Les avantages et les désavantages de la fréquentation du savant avaient été examinés en détail. Le principal grief formulé avait été celui de son manque de sociabilité :

Vraiment leur chagrin, leur humeur bizarre, leur fatras de passages grecs et latins sont de fort jolies fleurettes pour acquérir l’estime des dames !
(Ibid.)

 

Dans l’Almahide (1660-1663) des Scudéry, une discussion s’engage pour savoir « lequel une dame devait préférer, ou d’un brave ou d’un savant » :

un homme de la compagnie demanda lequel une dame devait préférer, ou d’un brave ou d’un savant […] ? Pour moi, dit notre illustre Grenadin, je ne trouve pas la chose douteuse, […] le savoir n’est que l’opération de l’esprit, et la valeur est celle de l’âme : or la force de cette âme est bien plus noble et plus grande que la vivacité de cet esprit ; puisque l’une produit les grandes actions, et que l’autre ne fait tout au plus que de beaux discours. […] Enfin le savant, par l’attachement qu’il a sur les livres, devient plus rêveur, et par conséquent moins aimable : au lieu de parler à sa maîtresse, il songe souvent à un auteur qu’il aura lu : et lorsque son corps est auprès d’elle, son esprit n’y est pas toujours.
(Almahide, t. V, Suite de la IIe partie, t. II, Livre 1, p. 1319-1323)

 

Dans le roman Macarise ou la Reine des îles fortunées (1664) de l’abbé d’Aubignac, le savant est présenté dans les termes suivants :

Ces faibles têtes chargées de sciences dures et de langues mortes ne peuvent souffrir que ce qui sent la fumée d’une lampe obscure et malpropre, la chicane de la grammaire ou de la philosophie, l’étymologie de quelque vieux mot qui n’est plus de service, ou l’examen de quelque proposition vaine , inutile et chimérique, les précisions et les définitions qu’il ne faut savoir que pour ne les dire jamais, ou qu’il ne faut dire qu’avec des précautions adroites et par quelque nécessité indispensable; en un mot, toutes les impuretés de nos écoles, les ordures des sciences et ces immondices du Parnasse qu’ils faut connaître une fois pour les éviter toujours
(p. 201-202)

 

Le terme de « savantas » était associé au registre burlesque et au genre de la satire depuis que Paul Scarron l’avait utilisé dans sa première Epître chagrine (1652) :

Dans le maudit siècle où nous sommes,
Le plus honnête homme des hommes […]
Fût-il savant et davantage
Que Nublé, Gaumin ou Ménage
Ou tels autres grands savantas,
Si la renverseuse d’Etats
Dont le choix est souvent blâmable,
Ne leur veut être favorable,
Et leur savoir et leur vertu
Leur serviront moins qu’un fétu.
(éd. M. Cauchie, Paris, Didier, 1947, t. II, p. 56-57)

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