Tourner en raillerie ce que les hommes révèrent

« Si j’avais un maître comme cela, je lui dirais fort nettement le regardant en face: « Osez-vous bien ainsi vous jouer au Ciel, et ne tremblez-vous point de vous moquer comme vous faites des choses les plus saintes? C’est bien à vous, petit ver de terre, petit mirmidon que vous êtes (je parle au maître que j’ai dit), c’est bien à vous à vouloir vous mêler de tourner en raillerie, ce que tous les hommes révèrent. Pensez-vous que pour être de qualité, pour avoir une perruque blonde, et bien frisée, des plumes à votre chapeau, un habit bien doré, et des rubans couleur de feu, (ce n’est pas à vous que je parle, c’est à l’autre;) pensez-vous, dis-je, que vous en soyez plus habile homme, que tout vous soit permis, et qu’on n’ose vous dire vos vérités? »
Don Juan ou le Festin de pierre, I, 2

Des admonestations semblables avaient été prononcées dans le « Second Sermon pour le IIe dimanche de l’Avent », prononcé le 6 décembre 1665 par Bossuet :

Que je suis étonné quand j’entends des hommes profanes qui dans la nation la plus florissante de la chrétienté, s’élèvent ouvertement contre l’Evangile! Les entendrai-je toujours et les trouverai-je toujours dans le monde, ces libertins déclarés, esclaves de leurs passions et téméraires censeurs des conseils de Dieu; qui tout plongés qu’ils sont dans les choses basses, se mêlent de décider hardiment des plus relevées ? Profanes et corrompus, lesquels, comme dit saint Jude, « blasphèment ce qu’ils ignorent, et se corrompent dans ce qu’ils connaissent naturellement :  » Quoecumque quidem ignorant, blasphemant; quoecumque autem naturaliter tanquam muta animantia norunt, in his corrumpuntur. Hommes deux fois morts, dit le même apôtre; morts premièrement parce qu’ils ont perdu la charité, et morts secondement parce qu’ils ont même arraché la foi : Arbores infructuosoe, eradicatoe, bis mortuoe : « Arbres infructueux et déracinés, » qui ne tiennent plus à l’Eglise par aucun lien. O Dieu ! les verrai-je toujours triompher dans les compagnies et empoisonner les esprits par leurs railleries sacrilèges?

 

Mais, hommes doctes et curieux, si vous voulez discuter la religion, apportez-y du moins et la gravité et le poids que la matière demande. Ne faites point les plaisants mal à propos dans des choses si sérieuses et si vénérables. Ces importantes questions ne se décident pas par vos demi-mots et par vos branlements de tête, par ces fines railleries que vous nous vantez, et par ce dédaigneux souris. Pour Dieu, comme disait cet ami de Job, ne pensez pas être les seuls hommes et que toute la sagesse soit dans votre esprit, dont vous nous vantez la délicatesse. Vous qui voulez pénétrer les secrets de Dieu, ça ! paraissez, venez en présence, développez-nous les énigmes de la nature; choisissez ou ce qui est loin ou ce qui est près, ou ce qui est à vos pieds ou ce qui est bien haut suspendu sur vos tètes ! Quoi ! partout votre raison demeure arrêtée ! partout ou elle gauchit, ou elle s’égare, ou elle succombe ! Cependant vous ne voulez pas que la foi vous prescrive ce qu’il faut croire.
( p. 183-184)

 

Dans son sermon « Sur la prédication évangélique », pièce maîtresse du Carême du Louvre de 1662, le même Bossuet avait dénoncé

ces docteurs de cour qui font des leçons publiques de libertinage et établissent de propos délibéré des opinions dangereuses.
(éd. F. Lachat, 1862, t. IX, p. 44)

 

Dans le sermon « Sur l’intégrité de la pénitence », également prononcé à l’occasion du Carême du Louvre, il vilipende l’orgueil de ces libertins :

Les voyez-vous, ces superbes qui se plaisent à faire les grands par leur licence; qui s’imaginent s’élever bien haut au-dessus des choses humaines par le mépris de toutes les lois ; à qui la pudeur même semble indigne d’eux, parce que c’est une espèce de crainte : si bien qu’ils ne méprisent pas seulement, mais qu’ils font un insulte public à toute l’Église, à tout l’Évangile, à toute la conscience des hommes ? Ergo et tu confundere : c’est toi, pécheur audacieux, c’est toi principalement qui dois te confondre. Car considérez, Chrétiens, s’il y a quelque chose de plus indigne que de voir usurper au vice cette noble confiance de la vertu. Mais je m’explique trop faiblement: la vertu, dans son innocence, n’a qu’une assurance modeste; ceux-ci, dans leurs crimes, vont jusqu’à l’audace, et contraignent même la vertu de trembler sous l’autorité qu’ils se donnent par leur insolence. Chrétiens, que-leur dirons-nous? Les paroles sont .peu efficaces pour confondre une telle arrogance.
(Oeuvres oratoires de Bossuet, éd. Lebarq, 1922, t. IV, p. 348)

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