Lettre du 2 janvier 1667, par Robinet.
-Publication par Ribou du Misanthrope et continuation des représentations du Médecin malgré lui :
Apostille.
Je donne Avis que chez Ribou,
Qui demeure vous voyez où,
Au Palais, vis-à-vis de la Chapelle, et à l’Image Saint Louis.
On débite le Lycanthrope,
Non, c’est l’amoureux Misanthrope,
Lequel fronde si bien les Gens
Sur les honteux Vices du Temps,
Qu’il n’est point d’École de Sage
Où l’on profite davantage
Que dans son merveilleux Chagrin,
De fine Morale tout plein,
Et, si sur la Scène on l’admire,
Il n’est pas moins charmant à lire.
Le Médecin fait malgré lui,
L’un des habiles d’aujourd’hui,
Notamment pour le Mal de Rate,
Qu’il guérit mieux qu’un Hippocrate
Avec son admirable Jeu,
Se trouve encor au même Lieu,
Et l’on connaît par sa Lecture
Que dans tout Genre d’Écriture,
Molière, de tous deux l’Auteur,
Est un admirable Docteur.
Lettre du 9 janvier 1667, par Robinet.
-Une évocation de la prestation de Madame dans le Ballet des Muses :
Mais, pour revenir au BALLET,
Le Tour galant assez me plaît
De notre nouvelle HÉROÏNE,
Qui, survenant à la sourdine,
Comme on dansait ledit Ballet,
Fit défiler le Chapelet
Et cesser toutes les Entrées
Qu’on avait si bien préparées,
Afin qu’on l’allât recevoir
Ainsi qu’il était du devoir.
C’est ce qu’on fit aussi, je pense,
Avec beaucoup de diligence
Et non moins d’exultation.
Mais, pour en faire mention
Dans un style plus historique,
Au Lecteur ainsi je m’explique.
DIMANCHE, second jour de l’AN,
Après quelque amoureux Élan,
C’est-à-dire douce Tranchée,
La REINE se vit accouchée
Presque dedans un tourne-main
Et par un très heureux Destin,
D’une gracieuse PRINCESSE, [Marie Thérèse de France.]
Qui remplit la COUR de liesse.
Il faisait, certes, beau la voir ;
Et, comme Elle naquit le soir,
On eût dit, aux douces lumières
Que poussaient ses tendres paupières
Et mêmes à son air riant,
Que c’était un ASTRE ORIENT
Qui venait, dans la Nuit obscure,
Rendre le Jour à la NATURE.
C’était une GRÂCE du moins
(Au rapport de plusieurs Témoins)
Qui découvraient, dès sa Naissance,
Qu’Elle établirait sa Puissance
Dessus les plus Illustres Coeurs
Par ses Charmes déjà vainqueurs ;
Si bien que la divine REINE
Ne pouvait faire aucune Étrenne
Plus agréable à notre ROI
(Et l’on en peut jurer sa foi)
Que d’une si charmante Fille,
Où déjà tant de beauté brille,
Après avoir ses Voeux remplis
Par le plus beau de tous les FILS.
Or, toutes choses préparées,
Comme on commençait les Entrées
Du BALLET des SoeURS d’APOLLON,
Où l’on voit maint beau Violon,
La BELLE rompit la Partie
Et voulut faire sa Sortie
Tellement que son cher PAPA,
L’ayant appris, laissa tout là
Et courut avec allégresse
Pour lui témoigner sa tendresse,
Dont, par de beaux petits OUAIS,
Sans se mettre autrement en frais,
Elle rendit grâce au grand SIRE,
Et c’est tout ce que j’en puis dire.
Sans attendre le lendemain,
On en fit par tout SAINT GERMAIN,
Dès le soir, de beaux Feux de Joie,
Dont beaucoup de bois fut la proie,
Et des mieux aussi l’on sonna,
Ou plutôt l’on carillonna.
Le jour d’après, PRINCES, PRINCESSES,
Grandes et petites Altesses,
Et tous les Gens de qualité
À la suprême MAJESTÉ,
Ayant bien affilé leurs langues,
Sur ce point firent des Harangues.
Divers AMBASSADEURS depuis,
Comme en leur Devoir bien instruits,
Ont été sur le pareil Thème
Complimenter le ROI de même.
Nos MAGISTRATS ont pris aussi,
À l’envi, semblable souci,
Et dans notre PARIS, si nette,
Avecque grand bruit d’Escopette
Et Tintamare de Canon,
Qui parle un peu d’un plus haut ton.
Bref, par des Feux et des Lanternes,
Tant suprêmes que subalternes,
On a fait la solennité
De l’illustre Nativité,
Laquelle s’en va, d’assurance,
Mettre partout en Feu la FRANCE.
-Le gazetier revient sur La Pastorale comique intégrée au Ballet des Muses :
Mercredi, le cas est certain,
Le Ballet fut des mieux son Train,
Mélangé d’une PASTORALE
Qu’on dit tout à fait joviale
Et par MOLIÈRE faite exprès,
Avecque beaucoup de progrès.
Étant allé voir, ce jour même,
Noter GRAND PORTE-DIADÈME,
Je fus vraiment sollicité
Par une obligeante BEAUTÉ
De demeurer à ce Spectacle ;
Mais, par un malheureux Obstacle,
Ayant des Affaires Ici,
Il m’en fallut sevrer ainsi.
Mais j’appris de la même Belle,
Comme un Ange spirituelle [sic],
Que l’excellente d’EUDICOURT,
L’un des beaux Astres de la Cour,
Dedans ce Ballet escarpine [sic]
D’une manière très poupine.
Lettre du 16 janvier 1667, par Robinet.
-Comme tous les ans, l’Épiphanie est l’occasion de fêtes à Versailles :
Le jour des ROIS, notre GRAND SIRE,
Qu’on craint, qu’on aime et qu’on admire,
Traita les BEAUTÉS de la COUR,
À son VERSAILLE[S], vrai SÉJOUR
Des RIS, des AMOURS et des GRÂCES.
On y vit aux premières Places,
Ainsi que de raison, MONSIEUR
Et le digne OBJET de son Coeur,
Dont l’on me voit le grand NOM mettre
À chaque mienne Épître en MÈTRE.
Je ne décris point ce Banquet,
Car, avecque tout mon Caquet,
Je ne vous tracerais qu’une Ombre
Du bel Ordre, et merveilleux nombre
De friand Mets qu’on y servit.
Mais, vous disant ce que j’ai dit :
Que c’était notre AUGUSTE SIRE
Qui traitait, N’est-ce pas tout dire ?
Les deux ALTESSES du HAUT-RANG,
Purs Rejetons du Royal Sang,
Ou les deux ALTESSES ROYALES,
L’une envers l’autre si loyales,
Ayant été cinq jours Ici,
Pour faire la figue au Souci
En ce Temps de Réjouissances,
De Ballets, de Momons, de Danses,
Ont, avec les Ris et les Jeux,
Masqué, je pense, un soir ou deux,
Étant bourgeoisement vêtues,
Afin d’être mieux inconnues.
Les SEIGNEURS qui les escortaient
Sous divers Habits se cachaient,
Représentant, entre autres choses,
De plaisants Avocats sans Causes.
Trois aussi des FILLES D’HONNEUR,
Contre qui ne tien aucun Coeur,
Semblaient, sous pareille Soutane,
De ces mêmes Gens à Chicane,
Mais avec lesquels on perdrait
Cent et cent fois le meilleur DROIT ;
Et leur charmante CAMARADE,
Qui le Franc-Arbitre dégrade,
Avait pris les simples Habits
D’une Gardeuse de Brebis.
Or cette Troupe bigarrée,
Très importante et peu parée,
Alla faire montre à l’Hôtel
De la belle de FORCADEL,
Ci-devant FILLE DE MADAME,
Et, depuis fort peu de temps, Femme,
Où se tenait un BAL ouvert,
Avec un excellent Concert.
-En cette période de fête, Madame a donné un bal masqué chez elle :
Mercredi, ma grande PATRONE,
Qu’une pleine Gloire environne,
Le donna dedans son PALAIS,
Où lors ses merveilleux Attraits
Auraient fait éclipser de honte
Ceux de la REINE d’AMATONTE.
MONSIEUR, sous un brillant Atour
Plus aimable aussi que l’Amour
Qui dedans ses yeux étincelle,
Commença la Danse avec Elle,
Et ce COUPLE si plein d’appas
Faisait si bien cadrer ses Pas,
Qu’on y connaissait la Justesse
Des Coeurs de l’une et l’autre ALTESSE.
MONSIEUR le DUC, tout éclatant,
Après eux, en les imitant,
Y mena sa belle CONSORTE
Tout à fait de galante sorte ;
Puis, chacun glissant à son tour,
Plus de la Moitié de la COUR,
Et dont était tout le beau Sexe,
Y fit des Pas de toute espèce,
Lesquels marquaient en maints endroits,
La souplesse de leur JARETS.
Quantité de TROUPES de MASQUES,
Mais Gens Sages et non fantasques,
Apportèrent illec leurs nez,
La plupart drôlement tournés.
Au reste, ce Bal d’importance
Où l’on vit si belle Assistance,
Fut assaisonné, c’est le bon,
D’une forte COLLATION,
Des plus exquises Confitures
Et d’autres friandes Pâtures,
Avec quantité de Liqueurs
Qui ragaillardirent les Coeurs.
Mais, achevons notre Épître
Par un autre important Chapitre.
-Parution d’un « Ouvrage Royal » :
Enfin, cet OUVRAGE ROYAL,
Que je puis dire sans égal,
Cette belle Carte Historique
Et même Généalogique
Des puissants POTENTATS des LYS,
Depuis le fameux SAINT LOUIS,
Paraît dignement en lumière
[Cette Carte se voit chez le sieur XXX, dans la rue Saint Jacques, à la Reine du Champs.]
Et comble d’une gloire entière
Notre incomparable FEUILLANT,
[XXX, Provincial de l’Ordre.]
Lequel seul avait le Talent
Et le Don de Persévérance,
Pour, en l’Honneur de notre France,
Commencer, suivre et couronner
Ce Travail qu’il vient de donner.
Ah ! si j’avais Voix en Chapitre,
Il en aurait et Crosse et Mitre ;
Mais quoi ? la mienne à rien ne sert ;
Servons donc vite le Dessert.
Lettre du 23 janvier 1667, par Robinet.
-Retour sur le bal qui fut donné chez Madame :
Parmi les Troupes joviales
Qui chez les ALTESSES ROYALES
Furent en Masques à leur BAL,
Qui ne peut guère avoir d’égal,
À bon droit, je me l’imagine,
Parut la DUCHESSE poupine
Que l’on nomme MAZARINI,
Objet de maints Attraits munis
Et qui pourrait bien, ce me semble,
Avec tant de Charmes ensemble,
Rendre heureux MONSIEUR son ÉPOUX,
Si le Sort, de son heur jaloux,
N’altérait sa Santé sans cesse,
Car ce Duc rempli de Sagesse
A d’ailleurs, si Seigneur en a,
Provision de MAMMONA.
Dieu veuille donc, je l’en conjure,
Lui rendre une Santé qui dure
Et, par là, remplir les Souhaits
Que sur ce Point j’ai déjà fait.
Mais, fermant cette Parenthèse,
Retournons vite à notre Thèse.
Avecque cet Objet charmant,
Sous un gaillard Déguisement,
Était cette autre AUSONIENNE
(Et c’est-à-dire Italienne),
Sa Soeur, qui MARIANE a nom,
Dont l’Esprit et le Corps mignon,
La bonne Grâce et la Sagesse
La rendent si digne Duchesse,
Et, pour en faire tout le Plan,
Épouse du GRAND CHAMBELLAN [M. le Duc de Bouillon.]
Qui de GODEFROI ressuscite
En lui le Coeur et le Mérite.
Le PRINCE aussi de MEKLEBOURG,
Fort estimé dans notre COUR,
Et la PRINCESSE sa CONSORTE,
Laquelle a toujours pour Escorte,
Les Grâces, les Ris et les Jeux
Et le plus beau de tous les Dieux,
Y furent en riche Équipage,
Et même eurent l’avantage
D’être parmi tous reconnus
Au grand air dont ils sont pourvus.
Aussi, dit-on en haute gamme,
Que la belle et brillante DAME
Soutenait des mieux le beau RANG
Qu’à présent partout Elle prend,
Par l’ordre du ROI, de PRINCESSE.
Comme chez sa ROYALE ALTESSE
Elle avait fait depuis deux Jours,
Sans affecter qu’un grand Concours
Fut lors le Témoin de sa gloire ;
Car on m’a dit, j’en ai mémoire.
Que le CERCLE était au déclin
Et beaucoup plus vide que plein
Quand Elle alla prendre sa Chaise,
N’étant plus fière ni plus aise
De cet Honneur qu’on lui rendait
Que d’une chose qu’on lui doit.
-Le bal chez la duchesse de Châtillon se termine par un incendie auquel échappe, fort heureusement, toute la compagnie :
Le Soir même, cette Princesse,
Qui fut de CHÂTILLON DUCHESSE,
Courut pareillement, dit-on,
Avec son Époux, le MOMON
Et fut en un beau Bal de Ville,
Dans notre aimable et riante ÎLE,
Au logis des fameux SAINTÔTS,
Où, pour tout dire en peu de mots,
Une BEAUTÉ de leur Famille,
Beauté laquelle beaucoup brille,
Qu’on nomme MADAME DE DREUX,
Bien digne d’Hommage amoureux,
Était des Pas la SOUVERAINE,
Où du BAL l’admirable REINE.
Aussi s’y fit-il un Concours
Tel qu’aux beaux Jours l’on voit aux COURS,
Et je pourrais encor plus dire,
Sans qu’en Faux l’on put s’en inscrire,
Que l’on y courut comme au Feu,
Car le SORT, souvent Trouble Jeu,
Par là voulut que l’ASSEMBLÉE
Dans ses Plaisirs se vit troublée.
Mais, presques [sic] en un Tourne main,
On éteignit ce Feu malin,
Et, si l’on cria davantage :
» AU FEU, AU FEU, » ce fut, je gage,
Celui que MADAME de DREUX
Allumait aux Coeurs par ses yeux.
Au reste, MONSIEUR et MADAME
Qu’unit une si noble FLAMME,
Cachant leurs beaux INDIVIDUS
Dessous des Atours de bibus,
Honorèrent de leur Présence
Le susdit Bal de conséquence,
Et pareillement, le JEUDI
(C’est le précédent que je dis),
Furent chez ce Foudre de Guerre,
Le grand la FERTÉ-SÉNETERRE,
Lequel, en Mortel radouci,
Donnait chez lui grand Bal aussi
Et souffrait (ô quelle merveille !)
Des Violons à son Oreille,
Lui qui n’écoute volontiers
Que les instruments meurtriers
Par qui, dans les Champs de Bellonne,
S’explique la Parque Félonne.
Mais ne vous en étonnez pas :
C’est le doux Effet des Appas
De sa MOITIÉ, charmante et sage,
Qui mitige ainsi son Courage ;
Et c’est ainsi que Monsieur MARS,
Chef de tout rempli de Tendresse
Aux Pieds de la belle DÉESSE
Qui mit au Jour le petit Dieu
Qui dans tous les Coeurs met le Feu.
-Évocation d’autres bals, légions en cette période :
On compte, de cette Semaine,
D’autres Bals plus d’une Vingtaine
Donnés avec Solennité
Dans la Parisienne Cité,
Et plus de cent Fredons de Masques
Qui, sans commettre nulles frasques,
S’y sont trouvés sous divers Noms
Et des Habits de plus bouffons.
-À la cour, le Ballet des Muses connaît un franc succès :
La COUR, à SAINT GERMAIN en LAYE,
Où se rencontre mainte Laye,
Se divertit semblablement,
Tout à fait agréablement,
Et l’excellent BALLET des MUSES,
Qui vraiment ne sont plus camuses
Depuis que, de belle hauteur,
LOUIS se dit leur Protecteur,
Contient tant de choses plaisantes
Et qui sont si satisfaisantes
Qu’il vaut seul, par ces Agréments
Les autres Divertissements.
À propos de Réjouissances,
De Cadeaux, de Momons, de Danses,
CLOTON aussi ne fait pas mal,
De son côté, le CARNAVALL,
Et l’on danse en toutes Contrées
Son grand BALLET, d’autant d’ENTRÉES
Qu’il est de Mortels et d’Emplois,
Sans excepter Papes ni Rois,
De cette Loi dure et griève.
L’ABBÉ de SAINTE GENEVIÈVE,
Naguère s’acquitta des Pas
Qu’on fait au Branle du Trépas ;
Le GRAND PRIEUR de FRANCE encore,
Que pour ses Vertus l’on honore
Dans le TEMPLE et partout Ici,
A fait la même chose aussi ;
Et MACHAUT, qui dans l’INTENDANCE,
En servant l’État d’importance,
A fait raccourcir tant de Gens,
Vient de faire à quatre-vingt ans
Pareille Danse que les autres.
Dites pour eux vos Patenôtres,
Et pensez, ô pauvres Mondains,
Que vous serez des Baladins,
Tôt ou tard, de Madame Parque
Et que vous passerez la Barque.
-Bossuet a fait un discours funèbre pour Anne d’Autriche :
Vous venez encor récemment
D’apprendre, sur le MONUMENT
De notre auguste REINE-MÈRE,
Cette Vérité nette et claire.
Vous avez, à son BOUT DE L’AN,
Non sans pousser maint triste Élan,
Oui les deux DISCOURS FUNÈBRES
Qu’on fait deux ORATEURS CÉLÈBRES,
Qui vous ont appris de nouveau [L’Abbé Bossuet et l’Abbé de Drubec.]
Qu’ANNE d’AUTRICHE est au Tombeau ;
Et dire que la Destinée
N’a pas cette Reine épargnée,
C’est un infaillible Argument
Que vous mourrez pareillement,
Après des Ans une Trentaine,
Ou peut-être une Quarantaine,
Dont plus du Tiers (ô triste Sort !)
Se doit au FRÈRE de la MORT.
Mais, sans pousser cette Morale
Qu’Ici, chemin faisant, j’étale,
Cet Article en forme mettons,
Et succinctement ajoutons
Que MONSIEUR avecque MADAME,
Lors triste jusqu’au fond de l’Âme,
MADEMOISELLE avec sa SoeUR,
Si dignes d’un brillant honneur,
Plusieurs autres d’illustre Titre,
Et même force GENS à MITRE
Se trouvèrent à ces Discours
Qui furent faits ces derniers jours [Mardi, Mercredi et Jeudi derniers.]
Avec de solennels SERVICES
Et de célèbres SACRIFICES,
Tant en l’ÉGLISE SAINT DENIS,
Lieu du TOMBEAU des ROIS des LYS,
Qu’au beau TEMPLE du VAL de GRÂCE,
Où tombe abondance de Grâce,
Et dans celui de ces NONNAINS
Qui seront un Jour des Corps Saints,
Savoir les Nonnains CARMÉLITES, [De la rue de Bouloy.]
Pleines de célestes mérites,
Et que la Reine assurément
Aime et protège tendrement.
Lettre du 30 janvier 1667, par Robinet.
-En Savoie, le carnaval est particulièrement gai :
Le CARNAVAL dans la SAVOIE
Se fait avec beaucoup de joie
Et, par un Prélude si beau,
Et si galant et si nouveau,
Son Duc en a fait l’ouverture,
Qu’il mérite, je vous assure,
Qu’on vous en donne en raccourci
Une légère Idée Ici.
C’était, sans qu’au Récit j’ajoute,
Une délicieuse JOUTE
De l’AMOUR et de la VERTU,
Où ce Nabot fier et têtu,
Sur un Char triomphant de Gloire
Et tout bouffi de sa Victoire,
Qui lui faisait voir à ses pieds
Maints POTENTATS humiliés,
Défiait au Combat ceux et celles
Dont à son Joug les Coeurs rebelles
Lui voudraient contester l’honneur
D’être l’UNIVERSEL VAINQUEUR.
En ce Défi de conséquence,
Ses SECONDS, Braves d’importance,
Étaient toutes les PASSIONS,
Qui des plus vaillants Champions
Font bien souvent dans ses Entraves
De honteux et chétifs Esclaves.
Mais, d’une autre part, la VERTU,
En dépit du Siècle tortu
Où peu la Belle l’on contemple,
Sur un autre CHAR, dans son TEMPLE
Parut, ayant à ses côtés
Les GRÂCES et d’autres BEAUTÉS,
Sous des Atours Amazoniques,
Avec des Dards, Lances et Piques,
Et l’on la vit si vaillamment
Assaillir le beau Garnement,
Qu’avecque toute sa Sequelle
Il en eut, bonne foi, sans l’aile.
Mais, pour tout dire, la VERTU,
Alors qu’il en fut abattu,
Parut avecque tant de Charmes
Qu’il lui fallut rendre les Armes,
Car enfin la Vertu pour lors
Était logée en ce beau Corps
Dont la DUCHESSE de SAVOIE
De son ÉPOUX comble la joie.
-À Versailles, la vie est également pleine de divertissements (le Ballet des Muses) :
On se divertit chaque jour
Aussi des mieux en notre COUR.MARDI, dans le charmant VERSAILLES,
L’on fut encor faire gogailles [sic].
Là, par le mouvement des Eaux
Qui en divers Tuyaux,
On entendit une belle Orgue
Qui fait à toute autres la morgue.
Je pense aussi qu’on y balla ;
Que veut-on plus après cela ?
Les autres jours de la Semaine,
Ainsi de Plaisirs toute pleine,
On a des MUSES le BALLET.
La Muse Dauphine à Monseigneur le Dauphin.
Première Semaine.
Du 3 février 1667, par Subligny.
-L’édit du roi pour le mariage en rapport avec le mariage du Duc de Chevreuse et de Mademoiselle Colbert :
Mais, Seigneur, méprisons cet odieux langage ;
Puisque notre façon cessaient toutes de l’être
Avantageux au Mariage,
Il nous en faut tous deux faire notre profit.
Il est vrai que la chose est tout à fait nouvelle :
Qu’une MUSE, qu’on croit une Vierge immortelle,
Contre son voeu s’engage en des liens si doux ;
Mais elle est encor moins étrange
Que de voir marier un Ange,
Et la belle COLBERT a bien pris un Époux !
Vous connaissez, je crois, cette illustre Personne.
Son Père, qui fait à la Cour
Des miracles pour la Couronne,
N’en fit pas un petit de lui donner le jour.
N’est-il pas vrai, SEIGNEUR, que c’est un Ange aimable ?
Mais ne changeons point de propos ;
Elle est aujourd’hui l’Épouse d’un Héros,
Petit-fils d’un illustre et fameux Connétable.
Le DUC DE CHEVREUSE est son nom.
Nous autres, pour quelle raison
Serions-nous Vierges, je vous prie,
Puisque cet Ange se marie ?
C’est bien pis ; sa charmante SoeUR,
Qui ne touche qu’à peine à sa dixième année,
Se veut mêler aussi de goûter la douceur
Que l’ont trouve dans l’Hyménée,
Et son Fiancée, SAINT-AIGNAN,
La doit épouser dans un An.
Ce CONTE, fils d’un DUC, les délices des Nôtres,
Par parenthèses, est un Héros aussi ;
La FRANCE le verra dans quelque temps d’ici.
Le DUC DE SAINT-AIGNAN n’en a jamais fait d’autres.
Pour vous en parler franchement,
Mon PRINCE, je suis fort trompée
Si, depuis que son Frère est dans le monument,
Ce COMTE a du regret de s’être fait d’Épée.
Je sais que quelques-uns de nos graves humains
Diront qu’un Bénéfice est une bonne affaire :
Mais telle Femme est un Bréviaire
Qui vaut bien quelquefois les bréviaires Romains.
À l’heure que je parle, on rit, on fait dépense,
On fait la noce encore, avec magnificence,
De l’accompli CHEVREUSE et de l’OBJET divin
Qui porte au plus haut point son glorieux Destin.
Tout l’HÔTEL DE COLBERT est en réjouissance :
On tient le bal, on fait festin.
Dans une même Salle on fait même, je pense,
La Fête de l’Illustre et superbe Alliance
De l’aimable DE LUYNE avecque LAVARDIN,
L’un des nobles Marquis de France,
Et MONSIEUR COLBERT même y danse.
Le croiriez-vous donc, cher Dauphin,
Qu’on le voit aller en cadence
Presque aussi bien qu’un beau blondin ?
Cela passe un peu la croyance.
Nous serions pourtant bons de ne le croire pas :
L’Art n’a rien de parfait dont son esprit n’abonde :
C’est lui qui remet même en cadence le Monde
Sous le plus grand des Potentats,
Et qui l’empêche bien de faire de faux pas.
Tout parle enfin de Mariage ;
Ce Nom remplit tous les discours.
Depuis la pension et le grand avantage
Que l’ÉDIT donne au fruit de ses chastes amours,
Il n’est point de fille si sage
Qui, si j’ose nommer ici le pucelage,
N’ait regret de l’avoir trop longtemps retenu.
Ce n’est plus à son gré qu’une fort sotte Idole,
Qui lui diffère ou qui lui vole
Deux mille francs de revenu.
Épousons donc, je vous supplie ;
Nous ne pouvons pas mieux choisir
Pour nous unir selon notre désir
Que ce temps où CHEVREUSE a son Ange s’allie.
C’est toujours une compagnie
Dont la jeunesse et les beaux jours
Nourriront à la Cour les jeux et les Amours,
Et qui nous fournira pour toute notre vie
De quoi ne point manquer de plaisir tous les jours.
D’ailleurs la récompense est solide et réelle
Pour ceux qui feront dix enfants.
Qui vous dit que dans peu de temps
Nous ne serons point dignes d’elle ?
Dix semaines pour moi sont autant que dix ans
Pour une expédition telle,
Et je vous apprends, cher Dauphin,
Qu’un Objet qui tient du Divin
Porte bien moins longtemps son fruit qu’une Mortelle ;
Témoin votre MAMAN qui, la dernière fois,
Pour faire une FILLE fort belle
Et que rechercheront un jour les plus grands Rois,
Ne fut point obligée à la porter neuf mois.
Mais qui prierons-nous de la Noce ?
La troupe, à mon avis, qui serait la plus grosse
Augmenterait d’autant notre contentement.
Il faut du moins tâcher que la Maison Royale
Nous donne son consentement,
Surtout ayons pour nous MAMAN LA MARÉCHALE,
Dans le commerce où nous entrons.
Si, comme elle a le soin des beau ENFANTS DE FRANCE,
Elle en avait aussi de ceux que nous ferons,
Nous aurions, MONSEIGNEUR, des biens en abondance.
Ah ! que j’étendrai loin le Nom de mon Époux !
Qu’on verra des effets bien dignes de ma flamme,
Puisque je vais être la Femme
D’un Prince charmant comme vous !
Approchant de plus près votre Auguste personne,
Ainsi qu’une Femme le doit,
C’est pour lors, beau Fleuron d’une Illustre Couronne,
Que, sachant sur le bout du doigt,
Les vertus que déjà la naissance vous donne,
Je pourrai bien mieux dans mes Vers
En faire part à l’Univers.
Ce sera pour lors, Mon beau PRINCE,
Que j’irai bien plus librement
Vous chercher dans chaque Province
Quelque digne sujet de divertissement.
Ce sera par cet Hyménée
Que ce que je promis de faire l’autre Année,
Dans celle où nous vivons se fera galamment,
Et qu’il ne sera point à Paris de Ruelles,
Point de secret appartement,
Dont, pour un Mari si charmant,
Je ne tire quelque Nouvelles.
Achevons donc, voici le temps
Où les Plaisirs viennent en foule
Présenter à mes Vers des sujets éclatants.
Ne permettons point qu’il s’écoule
Sans conclure un Hymen si doux ;
Donnez-moi votre foi, je vous donne la mienne,
Et, dès JEUDI prochain, que rien ne nous retienne
De nous mettre en état de causer en Époux.
Lettre du 6 février 1667, par Robinet.
-Fêtes dans le Saint Empire :
Des ANGLES le jeune et beau SIRE,
Dont l’AMOUR partage l’Empire,
Divertissant, mais du bel air,
L’Objet à son Coeur le plus cher,
Cette belle INFANTE d’ESPAGNE,
À présent sa digne COMPAGNE,
Après les Feux, Chasses, Cadeaux,
La fait courir sur les Traîneaux,
Et ce Plaisir Elle eut naguère
D’une fort galante manière.
Auprès de son aimable Époux,
Qui des mieux lui fait les yeux doux,
Elle était sur un magnifique,
Atournée à la Germanique,
Ayant un Bouquet ample et beau
De Plumes vertes au Chapeau,
Tout brillant des Trésors qu’étale
La superbe Inde Orientale.
Plus de soixante autres Traîneaux,
Des plus galants et plus nouveaux,
Qui tenaient presque un quart de lieue,
Roulaient en bon ordre à sa Queue,
Avec l’Élite de la COUR,
Tout à fait pimpante en ce Jour.
On y voyait les deux PRINCESSES
Que l’on appelle Archiduchesses,
Derrière les deux MAJESTÉS,
Chacune ayant à ses Côtés,
Pour conducteur, un Seigneur grave
Que l’on appelle Illec Marckgrave,
Ce qui veut dire Ici Marquis,
Et tous deux d’un mérite exquis.
Quarante-six DAMES ensuite,
Et chacune d’Elles conduite
Aussi par un leste GALANT
En un Équipage brillant,
Faisaient la plus belle partie,
Et certes la mieux assortie
De tout ce qui venait après.
Or cet Ébat, qu’on prit au frais,
Fut suivi d’un BAL d’importance,
Où juste parut la Cadence
Du noble COUPLE COURONNÉ,
Et ce Bal fut assaisonné
D’un très délicieux RÉGALE
Qu’on servit à l’Impériale.
Hé bien ! dites, mon cher Lecteur,
L’entend-il ce brave EMPEREUR,
Et peut-il de meilleure sorte
Réjouir sa noble CONSORTE,
Faisant, pour tout dire, entre nous,
Si bien tous les Devoirs d’Époux,
Qu’on publie avec allégresse
Déjà dans VIENNE sa Grossesse.
-La reine d’Angleterre en mauvaise santé :
Un Bruit courait ces derniers Jours,
Qui n’a plus maintenant de cours,
Que de la PARQUE tyrannique
La jeune REINE BRITANNIQUE
Avait senti le mortel Dard,
Dont ne nous couvre aucun Rempart.
Son Mal, qui venait d’ORDINAIRE,
Petit à petit, dégénère,
Si que dans peu sa Majesté
Aura sa pristine Santé
Et pourra bien, par aventure,
Au gré de Madame NATURE,
Augmenter par de doux efforts
Les VIVANTS et non pas les MORTS.
-Fête à l’hôtel Colbert pour le Mariage de Mademoiselle Colbert et du Duc de Chevreuse :
Mercredi, le DUC de CHEVREUSE,
Couronnant sa Flamme amoureuse,
Fiança cet OBJET charmant
Qui de son Coeur était l’aimant,
C’est à savoir la FILLE AÎNÉE
Que l’on tient tout à fait bien née,
De l’illustre Monsieur COLBERT
Qui le ROI si sagement sert.
En même temps, et chez lui-même,
Par un autre bonheur extrême,
Le cher MARQUIS de LAVARDIN,
Qui ne manque pas de Dindin,
Fiança la belle de LUYNES,
PUCELLE alors des plus poupines,
Et notre admirable PRÉLAT,
Qui fait tout avec tant d’éclat,
Fit la belle CÉRÉMONIE,
Devant nombreuse COMPAGNIE
Qui n’était toute que de GRANDS
Tant des Amis que des Parents,
Comme vous le voyez en marge,
Et tout du long et tout du large.
[XXX]
Après, vint la COLLATION,
Qui, sans amplification,
Aux plus belles était égale,
Et LAMBERT, dedans ce Régale,
Mêlant un Plat de son Métier,
Sur si noblement marier
Sa Voix et son Théorbe ensemble
(Et je crois l’ouïr, ce me semble),
Que ses Auditeurs ébaudis
Se crurent dans le PARADIS.
Mais en ce LIEU, non plus qu’un ANGE,
Aucun ne boit, aucun ne mange,
Au lieu qu’Ici, sur nouveaux frais,
L’on se reput de friands Mets
Qu’en un SOUPER fait dans les Formes
On servit en maints Plats énormes ;
Pendant quoi divers Instruments
Faisaient par leurs Accords charmants
Une excellente Mélodie.
Après, on eut la COMÉDIE,
Et lors, étant plus de Minuit,
Le DIEU D’HYMEN enfin unit
Ces deux jeunes et brillants COUPLES,
Aux Lois de l’AMOUR des plus souples,
Qui s’en allèrent prestement
Chacun en son Appartement
Pour exécuter ces Paroles,
Qui n’ont point certe [sic] été frivoles ;
CRESCITE [sic], MULTIPLICATE [sic].
Or, pour dire la Vérité,
Ils s’en seront tous, que je pense,
Acquittés en leur conscience,
Voire mêmes comme à l’envi,
De quoi, pour moi, je suis ravi,
Souhaitons que deux beaux CHEFS D’oeUVRES
Dans neuf mois sortent de leurs oeUVRES.
Lettre du 13 février 1667, par Robinet.
-Fêtes dans l’Empire :
L’EMPEREUR LÉOPOLD IGNACE,
Exempt d’une telle Disgrâce,
Ne pense à présent tous les jours,
Entre les Jeux et les Amours,
Qu’à faire ébaudir son ÉPOUSE,
Qui n’a des Ans guère que douze ;
Et, se plaisant fort aux Traîneaux,
Sur le Sien, certe [sic] des plus beaux,
Il la conduisit, à son aise,
Encor du mois dernier le seize.
L’illustre MARQUIS de DOURLAC,
Qui, dit-on, aime le TRIC TRAC,
Et le beau PRINCE DE LORRAINE,
Qui courageusement dégaine,
Avaient sur deux autres Traîneaux
Deux assez précieux Dépôts,
À savoir, les ARCHIDUCHESSES,
Qu’on tient deux aimables PRINCESSES.
Maint autre SEIGNEUR ALLEMAND
Sur le Sien et très galamment,
Menait une Dame Allemande,
Et la Traînée était fort grande.
Mais un Cheval, pour cent raisons
Digne des Petites Maisons,
Troubla soudain la belle Fêtek
S’étant mis dans sa folle Tête
De prendre un trop fougueux Essor,
Si bien que, malgré tout effort,
Il emporta loin sa Voiture,
Hors de Chemin et de droiture ;
Et c’était le Second Traîneau,
Tout à fait magnifique et beau,
Portant l’Archiduchesse Aînée,
Qui plus que Jeu fut lors traînée,
Avec le Marquis Conducteur,
Qui moins qu’elle n’eut pas de peur.
Mais enfin pour la peur susdite
Chacun de ces deux en fut quitte,
Et ce petit Événement,
Presque à la mode du Roman,
Ne fit qu’augmenter l’Allégresse,
Plus grande après quelque Détresse.
Ainsi, de retour au Palais,
Tous ces Gens à Traîneaux, fort gais,
Déconfirent un grand Régale,
D’une guise bien joviale,
Et puis, en dépit du Cheval,
Gambadèrent des mieux au BAL.
L’IMPÉRATRICE DOUAIRIÈRE,
Galante de belle manière,
Donna, dit-on, dernièrement
Aussi le Divertissement
D’un agréable LOTERIE,
En laquelle, sans tricherie,
La jeune IMPÉRATRICE eut l’heur,
Chez le Sort étant en faveur,
D’emporter certaine Cassette
Qui d’une seule Agathe est faite,
Les deux Princesses, à leur tour,
Et chaque Dame de la Cour
Ayant, selon l’intelligence
Qu’elles avaient avec la Chance,
Aussi tiré divers Bijoux,
De plus grands ou de moindres Coûts.
-En France, la saison du Carnaval bat son plein, et le Ballet des Muses également :
Ne sachant point d’autres Nouvelles
Pour les nouvellistes Cervelles
Qui vaillent qu’on en fassent un Plat,
Tout se trouvant au même état
Que je le mis dans ma Dernière,
Qui fut pleinement Gazetière,
Je vais m’étendre, pour ce Jour,
Sur celles de Ville et de Cour,
Qui sont le plus digne Régale
De cette Saison Carnavale.
PHILIPPES [sic], plus beau qu’ADONIS,
Tant en lui sont d’Appas unis,
Et son adorable HENRIETTE,
L’Auguste Objet de ma Musette,
Sont venus au PALAIS ROYAL
Faire un Bouquet de Carnaval.
Là, par un plaisir délectable,
Souvent je les ai vus à Table,
Tandis que douze Violons,
Qui semblaient autant d’Apollons,
Régalaient leurs fines Oreilles
Par mille charmantes merveilles.
Ils avaient cet ANGE auprès d’eux
Qu’ont mis au Jour leurs premiers Feux,
La mignarde MADEMOISELLE,
Comme un Ange spirituelle,
Avec la PRINCESSE MIMI, [Petite Fille de Madame.]
Personne importante, vraimi.
C’est elle qui, sur la Fougère,
Quand notre HÉROÏNE est BERGÈRE,
Dans le grand BALLET des Neufs SoeURS,
Fait trembler les Loups ravisseurs,
Comme l’a mis dans son beau Livre,
Qui fera MIMI toujours vivre,
BENSÉRADE, que, sans abus,
On peut dire notre PHÉBUS.
MONSIEUR a vu la belle HALLE
Où tant de Richesses on étale,
La FOIRE, à parler autrement,
Étant assez sortablement
Avecque la grande HÉROÏNE,
Laquelle est sa propre COUSINE,
Et qui fait briller dans ses Yeux
Tout ce qu’ont de plus grand les DIEUX.
Or ce PRINCE et cette PRINCESSE,
Comme deux Sources de Liesse,
En comblèrent tous les Marchands,
Des plus petits jusqu’aux plus grands ;
Mais ceux qui virent leur Monnaie
Sentirent le plus cette Joie,
Car je crois bien que sans jouer
Et sans leur Bourse délier
Ces ALTESSES pleines de Gloire
Ne sortirent point de la FOIRE.
Ce même HÉROS, si charmant,
Et sa MOITIÉ pareillement,
Où le CIEL tant de DONS assemble,
Ont masqué derechef ensemble
Et couru, sous divers Habits,
Les plus beaux Bals durant deux Nuits
Ayant dans leur TROUPE galante
Une JEUNESSE fort brillante
Et qui cachait sous ses Atours
Tout ce qui peut plaire aux Amours.
D’ARMAGNAC la belle COMTESSE,
De BOUILLON la gente DUCHESSE,
La charmante MAZARINI,
Toutes mérite infini ;
ITEM, MADAME DE THIANGE,
Qu’on embrassait mieux qu’un ANGE,
Et ces quatre jeunes BEAUTÉS
Que l’on voit toujours aux côtés
De l’illustre ALTESSE ROYALE,
Faisaient la Bande joviale
Avecque maints SEIGNEURS fringants
Comme on est en ses jeunes Ans.
Ce Principal FREDON de MASQUES,
Dont nul n’est du Pays des Basques,
Courant les Bals plus renommés,
Entre autres que l’on m’a nommés,
À qui je veux faire la grâce
De leur donner en ce Lieu place,
Sans m’étendre dans le Détail,
Alla chez MADAME PORTAIL,
Qui de LUSIGNAN est COMTESSE,
Objet inspirant la Tendresse,
Puis chez sa SoeUR de FORCADEL
Qui