Le chagrin et le supplice de cette vie

« Ce fils que j’obtiens, en fatiguant le Ciel de voeux, est le chagrin et le supplice de cette vie même dont je croyais qu’il devait être la joie et la consolation. De quel oeil, à votre avis, pensez-vous que je puisse voir cet amas d’actions indignes dont on a peine aux yeux du monde d’adoucir le mauvais visage, cette suite continuelle de méchantes affaires, qui nous réduisent à toutes heures à lasser les bontés du Souverain, et qui ont épuisé auprès de lui le mérite de mes services, et le crédit de mes amis? Ah, quelle bassesse est la vôtre! Ne rougissez-vous point de mériter si peu votre naissance?  »
Don Juan ou le Festin de pierre, IV, 4

Des propos similaires à ceux de Don Louis figuraient dans les déplorations de Don Alvaros, père de Don Juan :

– dans Le Festin de pierre de Dorimond (1659) (1)
– dans Le Festin de pierre de Villiers (1660) (2)

 

 


 

(1)

Ah ! père malheureux, quelle est ta destinée !
À quels tourments ton âme est-elle condamnée !
Celui que je croyais mon unique support
Est celui maintenant qui me donne la mort.
Un fils où je mettais toute mon espérance,
Où je croyais trouver une entière assurance,
Détruit de mon honneur le renom affermi
Et des vertus se rend l’exécrable ennemi.
(I, 4)

 

(2)

Ah, malheur déplorable ! Père trop malheureux d’un enfant exécrable !
De quels yeux maintenant oserai-je plus voir
Un fils qui foule aux pieds l’honneur et le devoir ?
Qui n’a qu’impiété et que fureurs dans l’âme,
Qui va porter partout et le fer et la flamme,
Et qui, sans respecter le sexe ni le rang,
Tue, enlève, assassine, et s’abreuve de sang ?
(I, 4)

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