La concurrence de deux princes

« Trop de choses, hélas! condamnent mes feux à un éternel silence. […] la concurrence de deux princes appuyés de tous les grands titres qui peuvent soutenir les prétentions de leurs flammes; de deux princes qui, par mille et mille magnificences, se disputent à tous moments la gloire de sa conquête, et sur l’amour de qui on attend tous les jours de voir son choix se déclarer,  »
Les Amants magnifiques, acte I, scène 1

La situation dans laquelle se trouve Eriphile, l’héroïne des Amants magnifiques, prise entre deux soupirants qui rivalisent de magnificence pour elle, et secrètement éprise d’un troisième, avait été exploitée à plusieurs reprises dans les romans des Scudéry.

 

On la retrouve ainsi dans

– la première partie (1660) de l’Almahide (1)
Célinte, nouvelle première (1661) : la noble, belle et riche Célinte est aimée du blond Ariston et du brun Méliandre, qui se découvrent rivaux mais aucun ne lui plaît car elle leur préfère Poliante (2)
– l’ « Histoire d’Abradate et de Panthée », du Grand Cyrus (1656) : Panthée est officiellement courtisée par Abradate et Mexaris et secrètement par Périnthe (personnage en proie à une « secrète mélancolie » semblable à celle de Sostrate) (3).

 

 


 

(1)

Entre mille languissants que firent dans la cour de Grenade et la beauté extraordinaire d’Almahide et son esprit sans comparaison, […] il y en eut deux qui soupirèrent plus haut que les autres et qui n’oublièrent rien de tous ces petits soins que les galants maures grenadins ont accoutumé d’avoir pour les personnes qu’ils aiment. Ce ne furent donc plus que sérénades, que bals, que ballets, que collations et que bouquets des plus rares fleurs que les Indes ont commencé de donner à l’Espagne. Et comme ces deux amants étaient fort riches et de la première qualité, ils commencèrent de se faire voir l’un et l’autre avec une magnificence d’habillement qui n’eut jamais de semblable.
(I, 3, p. 1642-1643)

 

(2)

L’égalité dont elle les traita, entretint longtemps l’amitié entre eux, et ils se parlaient quelque fois de l’indifférence de Célinthe, comme s’ils n’eussent pas été Rivaux. Il s’opiniâtrèrent pourtant à la servir, et il n’y a nulle sorte de divertissement qu’ils n’essayassent de lui donner. Tantôt l’un lui donnait le Bal, tantôt l’autre lui donnait la Comédie, une autre fois une Collation magnifique, ou quelque agréable Sérénade ; mais quoiqu’un des hommes du monde qui a l’esprit le plus délicat, ait dit en un fort joli couplet de chanson, que Qui divertit, bien souvent persuade, ils la divertirent, et ne la persuadèrent point. Au contraire, plus ils songeaient à lui donner du plaisir, plus ils se reculèrent de son coeur.
( p. 154)

 

(3)

Cependant comme Mexaris croyait que l’âme des autres était comme la sienne, il crut que pour toucher le coeur de cette Princesse, et lui faire recevoir favorablement les premières protestations de son amour, il était à propos de lui faire voir auparavant la magnificence de ses Trésors : qui comme je l’ai déjà dit étaient presque ; aussi riches que ceux de Crésus. Il chercha donc à trouver invention de la faire aller chez lui, sur quelque prétexte qui ne lui fût pas de dépense : et après y avoir bien songé, il imagina de lui donner la Musique du Roi, qui ne lui coûterait rien dans une grande Salle voûtée, extrêmement propre pour les concerts d’Instruments. De sorte qu’ayant fait proposer la chose, par la Princesse Palmis qu’il en pria, cette partie se fit, et s’acheva peu de jours après.
(V, 1, éd. 1656, p.75-76)

 

Je ne m’arrêterai pas non plus, à vous dépeindre exactement la magnificence d’Abradate : car elle fut telle, que je ne le pourrais pas. Je dirai donc seulement, qu’il donna une Collation admirable : et par la politesse avec laquelle elle fut ordonnée et servie, et par l’abondance de tout ce que la Saison avait de plus rare et de plus délicieux.
(V, 1, éd. 1656, p. 86)

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