Un tel carpe diem, célébrant l’ « aimable jeunesse », se retrouve dans l’exhortation de Corisca à Amarillis à la scène 5 de l’acte III du Pastor fido de Guarini.
Godiam sorella mia,
godima, ché’l tempo vola e posson gli anni
ben ristorar i danni
de la passata lor fredda vecchiezza ;
ma, s’in noi giovinezza
una volta si perde,
mai più non si rinverde.
E a canuto e livido sembiante
Puo ben tornar Amor, ma non amante.Profitons du temps qui s’écoule.
Dans un âge plus avancé,
Nous voyons mourir toutes choses ;
Et quand le printemps est passé,
Il ne nous reste plus de roses ;
La jeunesse ne revient plus,
Et pour la rappeler les voeux sont superflus,
L’Amour, malgré les ans; peut enflammer nos âmes,
Par un rigoureux châtiment ;
Mais s’il revient avec les flammes
Il ne ramène pas l’Amant
(trad. de l’abbé de Torche, 1666 ; éd. de 1672, p. 269-271)
On le retrouve dans des airs contemporains, par exemple dans cette sarabande du Nouveau Recueil des plus beaux airs de cour (1666) :
Aimons-nous, aimable Bergère,
Car nous n’aimerons pas toujours,
Le temps, d’une aile trop légère,
S’envole et ravis nos amours :
Montre-toi bonne ménagère
Des plus doux plaisirs d’ici bas ;
C’est une chose passagère,
Mais toi-même ne l’es-tu pas ?
( p. 36)
Ou dans cette chanson du même recueil :
Aimez, charmante blonde,
Goûtez ce doux plaisir,
De tous les coeurs du monde
Vous avez à choisir :
Aimez, charmante blonde,
Goûtez ce doux plaisir.
Pendant votre jeunesse,
Donnez-vous à l’amour,
Le temps coule sans cesse,
Et n’a point de retour
Pendant votre jeunesse,
Donnez-vous à l’amour.
Si vous êtes habile,
Employez bien le temps,
Il n’est rien si fragile
Que les fleurs du printemps :
Si vous êtes habile,
Employez bien le temps.
[…]
( p. 39-41)