Des choses par-dessus les maisons

« Je l’ai tant tourné de tous les côtés, qu’il a prêté l’oreille aux propositions que je lui ai faites d’ajuster l’affaire pour quelque somme; et il donnera son consentement à rompre le mariage, pourvu que vous lui donniez de l’argent. – Et qu’a-t-il demandé? – Oh d’abord, des choses par-dessus les maisons. – Et quoi? – Des choses extravagantes. – Mais encore? – Il ne parlait pas moins que de cinq ou six cents pistoles. – Cinq ou six cents fièvres quartaines qui le puissent serrer. Se moque-t-il des gens? »
Les Fourberies de Scapin, II, 5

Une situation semblable est développée à la scène IV, 3 du Phormion de Térence

– dans la version latine connue au XVIIe siècle (1)
– dans la traduction janséniste de 1647 (2)
– dans la traduction de Marolles (1659) (3)

 

 


 

(1)

Postquam hominem his verbis sentio mollirier,
« Soli sumus nunc hic » inquam: « eho dic quid vis dari
Tibi in manum, ut erus his desistat litibus,
Haec hinc facessat, tu molestus ne sies? »
AN. Satin illi di sunt propitii? GE. « nam sat scio,
Si tu aliquam partem aequi bonique dixeris,
Ut ille est bonus vir, tria non commutabitis
Verba hodie inter vos. »
DE.. quis te istaec jussit loqui?
CH.. Immo non potuit melius pervenirier
Eo, quo nos volumus.
GE.. occidi! DE.. perge eloqui.
GE.. At primo homo insanibat. CH.. cedo quid postulat?
GE. quid? nimium; quantum libuit. CH. dic. GE. si quis daret
Talentum magnum.
CH. immo malum hercle: ut nihil pudet!
GE.Quod dixi adeo ei.
[…] »ager oppositus est pignori ob
Decem minas » inquit.
De. age age, eam ducat: dabo.
GE. « aediculae item sunt ob decem alias. » GE. oiei
Nimium est.
GE. ne clama : petito hasce a me decem.
GE. « uxori emenda ancillula ; tum pluscula
Supellectile opus est; opus sumptu ad nuptias:
His rebu’ pone sane » inquit « decem minas. »
DE. Sexcentas proin potius scribito jam mihi dicas:
Nil do. inpuratus ne ille ut etiam inrideat?

 

(2)

Voyant qu’il paraissait ému par ce discours, j’ai ajouté : « Ecoutez, nous voila seuls : dites-moi ce que vous voulez que mon maître vous donne afin qu’il sorte de tous ces procès, que cette femme s’en aille hors de chez lui, et que vous ne veniez plus lui rompre la tête. AN. Cet homme a-t-il perdu l’esprit ? GE.Car je sais fort bien, que si vous voulez un peu vous mettre à la raison, comme c’est le meilleur homme du monde, vous n’aurez pas d’aujourd’hui la moindre chose à démêler ensemble. DE. Qui t’avait donné charge de lui porter cette parole ? CH. Non, pardonnez-moi, il ne pouvait pas mieux faire pour venir au point que nous désirons. AN. Je suis mort. CH. Continue. GE. D’abord il m’a dit des folies. CH. Mais enfin que demande-t-il ? GE. Ce qu’il demande ? Tout ce qui lui est venu en fantaisie, cela est par-dessus les maisons. CH. Mais encore ? GE. S’ils me pouvaient donner, dit-il, cinq cents écus. CH. Cinq cents coups de bâton, plutôt. N’a-t-il point de honte ? GE. C’est ce que je lui ai dit […] « J’ai, dit-il un peu de terre qui est engagée pour vingt pistoles. » DE. Oh bien, qu’il l’épouse, je les lui donnerai. GE. « J’ai encore une petite maison, engagée pour vingt pistoles. DE. Oh non, c’est trop. CH. Ne criez point, c’est moi qui les donnerai. GE. Il faut, outre cela, acheter une petite servante pour ma femme ; il faut un petit ameublement, il faut quelque petite chose pour les frais des noces, ; cela, dit-il, quand vous mettrez vingt pistoles, ce n’est pas trop. DE. Ah, qu’il me fasse plutôt cinq cents procès. Il n’aura pas un double de moi. Cet infâme-là viendra encore se jouer de nous ?
(IV, 3, p. 181-182)

 

(3)

Oyant qu’il était ému par ce discours, j’ai ajouté ; Ecoutez, nous voilà seuls, dites-moi ce que vous voulez que mon Maître vous donne, afin qu’il sorte de tous ces procès, que cette femme s’en aille hors de chez lui, et que vous ne veniez plus lui rompre la tête. AN. Les Dieux ont-ils assez de bonté pour lui ? GE. Car je sais bien, Phormion, que pour peu que vous lui fassiez des propositions justes et raisonnables, comme il est un des meilleurs hommes du monde, vous n’aurez pas à démêler aujourd’hui trois paroles ensemble. DE. Qui t’a commandé de parler de la sorte ? CH. Non, non, croyez-moi, il ne pouvait mieux faire pour venir au point où nous voulions aller. AN. Cela me fait mourir. CH. Continue. GE. Il perdit le jugement d’abord, et ne savait ce qu’il disait. CH. Dis-moi ce qu’il voulait. Que demandait-il ? GE. Ce qu’il demandait ? Des choses extravagantes, et tout ce qui lui venait en fantaisie. CH. Mais encore ? GE. Il le ferait possible, si quelqu’un lui donnait la valeur d’un grand talent [Cinq ou six cents écus]. CH. Mais plutôt un mal incurable. Comment ? N’a-t-il point de honte ? GE. C’est ce que je lui ai dit. […] J’ai (dit-il) un peu de terre qui est engagée pour dix mines d’argent. DE. Oh bien, qu’il l’épouse, je lui donnerai cet argent. GE. Il y a aussi une petite maison engagée pour pareille somme. DE. Hoi, hoi, c’est trop. CH. Ne criez point pour cela, demandez-la-moi. GE. Il faut acheter outre cela une petite servante à ma femme, et une autre qui soit robuste pour le ménage. Il y a d’ailleurs quelque dépense à faire pour les Noces. Ajoutez-y encore (dit-il) dix mines tout au moins. DE. Qu’il me fasse ajourner plutôt cent fois pour me chicaner, je ne lui veux plus rien donner. Comment ? Il se viendra ici encore moquer de nous ?
(p. 424-425)

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