La description du combat ridicule est un morceau de bravoure mis au goût du jour dans la littérature burlesque.
On en trouve un exemple dans
– la satire « Le jeu de boules des procureurs » (1655) de Furetière (1)
– Le Virgile travesti (1648-1652) de Paul Scarron (2)
(1)
A ces propos sanglants, l’hussier fâché s’avance,
Lui porte un coup de poing pour défi dans la panse;
Ils se prennent aux crins, tous deux embarrassés,
Non point pour se baiser se tiennent embrassés.
Dès le premier effort de leurs mains animées,
Que de cheveux tirés et de barbes plumées !
Les perruques, chapeaux, calottes vont à bas,
On n’y respecte point manchettes ni rabats;
La bande d’un pourpoint est d’un bout arrachée,
La terre est de rubans et de basques jonchée;
L’un saigne des naseaux, l’autre a les yeux pochés,
Et tous deux ont la joue et le front écorchés.
L’huissier, comme plus fort, prend l’autre et le collette,
Dont il crèpe de rage et rompt son aiguillette;
Son haut-de-chausse tombe et met la braie au vent.
(Poésies diverses, 1655, p. 48)
(2)
Les voilà donc prêts à bien faire,
Entellus et son adversaire,
Se faisant mines de magots,
Id est s’entrefaisant la moue.
D’abord et l’un et l’autre joue,
Et, comme pour escarmoucher,
Porte maints coups sans se toucher;
Puis s’échauffant dans l’escarmouche
L’un d’eux son adversaire touche,
Qui, fâché d’avoir mal paré,
Lui rend le change bien serré;
Enfin tout de bon ils se tâtent,
Et plusieurs beaux membres se gâtent,
Darès plus qu’Entellus gaillard,
Entellus plus puissant paillard.
Poings avancés, ceste en arrière,
Les yeux ardents, la mine fière,
Ils s’entr’assomment, les grands fous,
D’une grande somme de coups.
Leurs poumons respirant à peine
A tous deux font grossir l’haleine,
Et leurs membres nus palpiter;
Tantôt un coup les fait roter,
Appliqué sur le diaphragme,
Et vomir du sang une dragme;
Tantôt l’un d’eux n’attrape rien,
Dont l’autre se trouve fort bien.
(Livre V)