La campagne de Flandre dans les Continuateurs de Loret en 1667

La campagne de Flandre est menée durant les mois qui précèdent et qui suivent la création d’Amphitryon. La comédie de Molière fait plusieurs allusions subtiles à ce contexte.

 

Le reflet des épisodes militaires qu’offrent les gazetiers nous permet de saisir à quel point ces circonstances sont présentes à l’esprit du public de Molière.

 

 

Lettre du 15 mai 1667, par Robinet.

 

-La guerre est en vue (guerre de dévolution) :

Mais, à propos de Tambour, Qu’est-ce
J’ois sans cesser battre la Caisse,
Je ne vois qu’Armes et Drapeaux,
Que Fantassins et que Chevaux,
Lesquels partent de cette Ville,
Remplis d’une guerrière Bile,
Et LOUIS même, avec sa COUR,
S’en va partir au premier jour :
Ce n’est pas pour tirer aux Merles
Et ni pour enfiler des Perles,
Je le gagerais, ma foi, bien ;
Mais ne disons encore rien.

 

 

Lettre du 22 mai 1667, par Robinet.

 

-La guerre :

Mais n’en parlons pas davantage,
Il est dispensé du Voyage
Que fait la REINE, en bel arroi,
Sur la FRONTIÈRE, avec le ROI,
Car, enfin, ce digne Monarque,
Où tant de Hauteur on remarque,
S’en va s’avancer, à grands pas,
Dans le fin coeur des PAYS-BAS,
Précédé de la RENOMMÉE
Et même suivi d’une ARMÉE
De soixante mil COMBATTANTS,
Qui sont tous de terribles Gens.

 

Mais, quoi ? le Grand Porte-Couronne
Ne veut faire mal à Personne
Et ne marche, il est bien certain,
À si grand bruit et si beau Train,
Comme Foi de Prince il l’atteste
Lui-même, par maint Manifeste,
Que pour forcer quelque ILION
Dont la louche REBELLION
Fermerait la Porte à la REINE,
Méconnaissant sa Souveraine,
Et qui dénierait en un mot,
Dans le BRABANT, dans le HAINAUT
Et dedans les autres PROVINCES,
Tant les grosses comme les minces,
Ce qui, selon toute équité,
Appartient à sa MAJESTÉ,
Comme clairement on le prouve
Dans l’Impression toute neuve
Des TRAITÉS donnés ric à ric,
Même en trois Langues au Public.
[XXX.]

 

Mais quels Peuples, d’âme tigresse,
Ne recevraient pas la PRINCESSE
Et, de bon coeur, ne rendraient pas
Hommage à tant de grands Appâts
Qui, joints à la Haute Naissance,
Font voir, avec trop d’évidence,
Qu’on ne peut en plus belles Mains
Mettre l’Empire des Humains ?

 

Aussi LOUIS, et bon et sage,
Avant qu’aller à son Voyage,
Lui remit, avec grand éclat,
Les Soins du dedans de l’État,
Lui laissant la pleine Puissance
De la Souveraine RÉGENCE,
Et SA MAJESTÉ mêmement
Le fit savoir au PARLEMENT,
Ainsi qu’à la CHAMBRE DES COMPTES
(Ce que je dis ne sont point contes),
Et je dois ajouter ici :
À la COUR DES AIDES aussi.

 

Sur cela, cette REINE illustre
Reçut, en son royal Ballutre,
Les Respects de leurs DÉPUTÉS,
Qui furent d’aise transportés
À l’aspect de telle RÉGENTE,
Également sage et charmante.

 

Au reste, il n’est rien de pareil
À notre Guerrier Appareil ;
On dirait qu’il est fait pour peindre,
Mais il n’en est pas moins à craindre.

 

Tous ces riches Accoutrements,
Tous ces lestes Ajustements ;
Ces superbes Orphévreries,
Ces Plumes et ces Broderies,
Qu’on voit jusques aux Gens de Pied,
Sont pour protester amitié,
D’une façon plus solennelle
Et plus éclatante et plus belle,
Avecque Messieurs les FLAMANDS,
S’ils ont pour nous des Sentiments
De chers et bon Compatriotes,
Ennemis de toutes Riotes.
Mais s’ils ne parlent pas Français
Et s’ils paraissent discourtois,
Cette même Magnificence
Servira, comme je le pense
(Et je le pense tout de bon),
À les réduire à la Raison
D’une façon plus solennelle,
Et plus éclatante et plus belle,
Car nos Gens, bien certainement,
Sont des Gens Braves doublement
Et qui joindront, sans raillerie,
La Bravoure à la Braverie.

 

 

Lettre du 29 mai 1667, par Robinet.

 

-La guerre :

Mais, quant à nous, avec l’ESPAGNE
Je vois qu’on parle de CAMPAGNE
Et que chacun, de son côté,
Remet la Rapière au côté.

 

Qui rompt donc ? Ce n’et pas la FRANCE,
Et la Chose est en évidence :
Elle demande seulement,
Justement, équitablement,
Les DROITS de son aimable REINE,
De son auguste Souveraine,
Et l’on les lui refuse : ERGO,
N’en déplaise à DOM RODRIGO,
C’est l’ESPAGNE, je l’en assure,
Qui seule fait cette Rupture.

 

Ce GOUVERNEUR des PAYS-BAS
Ces raisons-là ne goûte pas
Et, craignant fort qu’on lui démembre
De son Régime quelque Membre,
Se trémousse par Monts, par Vaux,
Et dans ses Postes principaux
Essaye de mettre tel Ordre
Que le FRANCAIS n’y puisse mordre.

 

Il n’omet rien enfin, mais quoi ?
Que fera-t-il contre un grand ROI
Couvert de splendeur et de gloire,
Qu’a toujours suivi la VICTOIRE
Aux Lieux où sa MAJESTÉ va
Et qu’il aurait conquis déjà
Si l’AMOUR, par de divins Charmes,
N’eût de ses mains fait choir les Armes,
En lui faisant voir les beaux Yeux
De THÉRÈSE, FILLE DES DIEUX.

 

Ce majestueux et beau SIRE,
Digne d’un MONDE pour EMPIRE,
Ayant, avec sa grande COUR,
Fait dans AMIENS quelque Séjour,
Est venu gîter vers PÉRONNE,
Et partout ses Ordres il donne
Avecque tant d’activité
Qu’on admire sa MAJESTÉ.

 

-Alors que le roi son père est en campagne, le Dauphin prend ses quartiers à Compiègne :

Notre DAUPHIN, plus beau qu’un Ange
Et digne de haute louange,
Avecque sa brillante Soeur,
Qui règnera sur maint grand Coeur,
À COMPIÈGNE, honorable Ville,
A fait choix de son Domicile,
Où le LIEUTENANT GÉNÉRAL
Lui fit un Compliment royal,
Auquel sa digne GOUVERNANTE,
Maréchale illutre et charmante,
Avecque grâce, avec esprit,
Et du fort bel air répondit.

 

Cet HÉRITIER de la COURONNE,
Que déjà la Gloire environne,
Ayant passé par CHAMPLÂTREUX,
UN PRÉSIDENT des plus heureux
L’y régala de belle sorte,
Ainsi qu’une Lettre le porte,
Comme il avait aussi traité
Et l’une et l’autre MAJESTÉ,
Avecque leur SUITE, à trois TABLES,
Où les Mets les plus manducables [sic.]
Furent servis profusément
Et même aussi très galamment.

 

-Monsieur en est également :

Le beau PREMIER MONSIEUR DE FRANCE,
Prince d’une rare excellence,
Impatient de prendre part
Aux Travaux de notre CÉSAR,
Partit, JEUDI, dès que l’AURORE
Par ses pleurs vint enrichir FLORE,
Pour aller, en guerrier état,
Joindre l’auguste POTENTAT

 

Deux jours auparavant, ses Pages,
Bien morigénés et bien sages,
Tous à l’avantage ajustés
Et, qui plus est, très bien montés,
Ses cent Hommes à Hallebardes,
Ou cent Suisses, et ses cent Gardes
(Ceux-ci sur de bons Destriers,
De haute mine et fort guerriers),
Avaient pris cette route même,
Montrant une Liesse extrême ;
Et, parmi cet assez beau Train,
Étaient force Chevaux de Main,
Conduits par leurs Valets d’Étrilles,
Qui tous paraissaient de bons Drilles,
IDEM, quantité de Mulets,
Que leur Carillon rendait gais,
Nonobstant la pesante Charge
Qui couvrait leur Échine large,
Et, pour tout dire en peu de mots,
Grand attirail de Chariots,
Pleins de Tentes et d’Ustensiles
Pour gîter au Camp fort utiles.

 

 

Lettre du 5 juin 1667, par Robinet.

 

-Nouvelles de la guerre :

Mais, des Nouvelles Étrangères,
Passons enfin à nos Affaires
Et discourons un peu du ROI :
Il le mérite bien, ma foi,

 

Cet illustre AMANT de la GLOIRE,
Ce FAVORI de la VICTOIRE,
Suivant leurs ravissants Appas,
Nuit et jour s’avance à grands pas
Dans les Routes que ces deux Frères
Ouvrent à ses Ardeurs Guerrières,
Et conduites par l’Équité,
Sa magnanime MAJESTÉ,
Sans se rapporter à Personne,
Incessamment les ordre donne,
Pose les Gardes, fait les Camps
Et règle les Détachements,
Si bien que, Seule à Soi semblable,
On ne voit qu’Elle infatigable.

 

Les dernières Nouvelles sont
Qu’ayant fait prendre, à VILLEPONT,
Du Pain pour cinq ou six journées
À ses TROUPES bien ordonnées,
Et distribuer aux Cavaliers
Des Outils jusqu’à dix milliers,
Elle était de ce Lieu partie
Pour une importante PARTIE,
En son Chemin côtoyant MONTS,
Dans un Pays tout plein de Monts ;
D’où je conçois de grandes Choses,
Mais ce sont encor Lettres closes.

 

Cependant force jeunes Gens,
Et mêmement des premiers Rangs,
Bon gré, mal gré notre MONARQUE,
Désirant donner quelque marque
Qu’ils sont pourvus d’un noble Coeur
Et qu’enfin ils aiment l’Honneur,
Vont chercher comme VOLONTAIRES
Des Occasions militaires,
Et MONSIEUR LE DUC en est un
Qui n’est point du tout du commun ;
ITEM, est en Ligne de compte
De SAINT PAUL, cet aimable COMTE,
Et d’ARMAGNAC pareillement,
Autre COMTE encor si charmant,
D’AUVERGNE, lequel tout de même
Est un COMTE qu’aussi l’on aime ;
ITEM, notre DUC de BOUILLON,
PRINCE friand du beau RENOM,
S’il en est un dans la Nature,
Sans à nul autre faire injure,
Et, bref, le COMTE de NOGENT,
Qui sera toujours diligent
À manifester son Courage
Contre qui voudra, je le gage.

 

Ce que je dis là ne plaît pas
AU GOUVERNEUR des PAYS-BAS,
Et, comme il prévoit des Disgrâces
Pour ses plus importantes Places,
Il en fait démolir plusieurs,
Pour unir ses forces ailleurs,
Entre autres ainsi, la BASSÉE
Est une Ville délaissée,
Comme aussi CONDÉ, SAINT-GERMAIN,
Démantelés rez le Terrain.
Mais on s’est saisi d’ARMENTIÈRE[S],
Se trouvant encor toute entière,
Et l’on dit que les HABITANTS
En ont tous paru bien contents.

 

-La reine a rejoint le Dauphin à Compiègne :

Ayant parlé de notre AUGUSTE,
Il est, ce me semble, bien juste
De mettre quelque chose Ici
De sa divine ÉPOUSE aussi.
Sachez donc que cette PRINCESSE
Remplit COMPIÈGNE d’allégresse,
Et qu’on est en cette CITÉ
Ravi de voir sa MAJESTÉ,
Qu’accompagne MADEMOISELLE,
Pour qui j’eus toujours un grand zèle.
Comme, en maints Chapitre divers,
Je l’ai témoigné par mes Vers.

 

 

Lettre du 12 juin 1667, par Robinet.

 

-Charleroi est tombée :

D’abord, deux OBJETS glorieux
Attirent nos Soins devers EUX
Et veulent nos premières Rimes,
Avec nos Respects légitimes :
C’est notre charmant COURONNÉ,
Notre grand HÉROS, DIEUDONNÉ,
Et MONSIEUR, son UNIQUE FRÈRE,
Qui le suit dans cette Carrière
Où la VICTOIRE avecque MARS
Marchent dessous nos Étendards.

 

C’est l’Article aussi que je pense
Qu’avec le plus d’impatience
À présent le Lecteur attend ;
Mettons-le donc au premier Rang.

 

Après une Marche ennuyeuse,
Qu’une Influence pluvieuse
Et même un froid contre Saison,
Dont je ne sais pas la raison,
Rendait incommode, sans doute,
Autant que mauvaise le Route,
Notre Illustre et belliqueux ROI
Arriva dedans CHARLEROI,
De ce Mois courant le deuxième.
Ayant été laissé, de même
Que d’autres Postes importants,
Faute de Coeur ou bien de Gens
Aux ESPAGNOLS, pour les défendre
(Car c’est ce que j’en puis comprendre),
Ledit FORT-CHARLE [sic.] était sans Corps
Et n’avait plus que les Dehors ;
Mais, comme on vit que cet Ouvrage
Serait d’un notable avantage
Pour s’ébaudir dans le Pays,
Il fut résolu par LOUIS,
Lequel dès lors y prit son Gîte,
Qu’il serait refait au plus vite ;
Depuis, MONS, BRUXELLES, NAMUR
Et LOUVAIN tremblent, pour le sûr.

 

Au reste, il faut que chacun sache
Que tous les PARTIS qu’on détache
Ne trouvent que des Gens de bien,
Qui ne leur disent du tout rien,
Ou qui, d’une humeur très honnète,
Leur font et compliment et fête,
Tant les Peuples, en bonne foi,
Souhaitent de se voir au ROI.
Exceptez-en quelques douzaines,
Ou, tout au plus, quelques centaines,
Lesquels, encor dedans l’erreur
Que LOUIS seul est le ROI leur,
Se croyant à CELUI du TAGE,
Ne montrent pas une Âme sage,
Mais qui, sans doute, en peu de temps,
Reviendront dedans leur bon sens.

 

Où donc ce Peuple sera Maître,
Notre MONARQUE pourra l’être,
Gagnant de tout chacun le Coeur
Par une obligeante douceur,
Avec laquelle, en conscience,
Sa MAJESTÉ donne audience
Mêmes aux plus chétifs Palots,
Qui, de joie, en chantent son los,
Souhaitant qu’un si charmant SIRE
Les ait bientôt sous son Empire.

 

Monsieur de CASTEL RODRIGO,
Qui vit, dans BRUXELLE, à gogo,
Ne pouvant le souffrir qu’à peine,
En a, je pense, la Migraine.

 

Le DUC d’ARSCOT, dans MONS
En est plus jeune que Souci
Et jouera, je vous proteste,
Pour l’empêcher, de tout son reste.

 

Enfin, le PRINCE de CHIMAY
N’en paraît pas non plus fort gai,
En LUXEMBOURG, je m’imagine,
Et songe avec quelle Machine
Il pourra détourner ce coup ;
Mais on ne les craint pas beaucoup,
Et, s’ils sont trois, notre grand SIRE
Leur peut, ce me semble, bien dire :
« Messieurs, nous sommes trois aussi
« Qui vous feront la Figue Ici, »
Car il a, pour combler sa Gloire,
Avec Lui MARS et la VICTOIRE.

 

-La reine doit retrouver le roi :

Que dis-je ? il a vraiment bien plus,
Et ces deux lui sont superflus :
Il a notre adorable REINE,
Qui s’en va le rendre, sans peine,
Par ses victorieux APPAS,
Triomphant dans les PAYS-BAS,
Car j’ai su que cette HÉROÏNE,
Par qui la Déesse CYPRINE
Est effacée entièrement,
Allait le joindre promptement
Dans AVESNE, et non dans NIVELLE,
Ainsi qu’en courait la Nouvelle.

 

Or, alors, le petit AMOUR,
Sortant de ses YEUX, son SÉJOUR,
Et là partout brûlant les Âmes
De ses plus légitimes flammes,
Lui fera rendre, en moins de rien
Et sans coup férir, tout son Bien,
Malgré, ma foi, la vaine Intrigue
De Monsieur de CASTEL RODRIGUE
Et de ses deux autres Suppôts,
Qui n’ont pas beaucoup de repos.

 

 

Lettre du 19 juin 1667, par Robinet.

 

-Le Roi laissant la guerre arrive à AVESNE pour retrouver la reine :

Est-il de plus belle Matière
Pour nous donner ample Carrière,
Par Exemple, que ce que fait
Notre MONARQUE si parfait,
Et par un plus charmant Chapitre
Puis-je initier mon Épître ?
Non, non, il en sera l’ALPHA,
Et je vais débuter par là,
Ainsi que dans ma précédente,
Qui fut trouvée assez coulante.

 

LOUIS donc, ce merveilleux ROI,
Laissant au Camp de CHARLEROI,
Pour commander en son absence,
L’illustre PHILIPPES de FRANCE,
En partit le huit du COURANT,
Afin d’aller, toujours courant,
À son doux Rendez-vous d’AVESNE,
Pour y voir notre auguste REINE,
QUI, dis-je, toujours courant, car,
Comme à présent ce vrai CÉSAR
Est tout entier à la VICTOIRE,
Où l’emporte la belle GLOIRE,
Il s’y dérobait, en ce jour,
Pour satisfaire à son AMOUR
Et puis pour retourner vers Elle
Lui montrer son belliqueux zèle.

 

Mais Elle ne l’attendit pas
Et, volant presque sur ses pas,
Elle fut, en ce Lieu d’AVEINE [sic.],
Aux côtés de la belle REINE,
Lui ceindre le FRONT du LAURIER
Que, par les Mains d’un grand GUERRIER,
Et qui sait bien les Villes prendre,
Elle avait cueilli dans la FLANDRE,
Réduisant BERGUE promptement,
Et par PÉLUDE seulement.

 

Le GOUVERNEUR d’icelle Ville
Tranchait du Fier et de l’habile,
Mais notre MARÉCHALE d’AUMONT
Fit bientôt à ce Rodomont
Changer d’humeur et de langage,
Si bien donc que, pliant Bagage
Et comme un Mouton filant doux,
Il dit que BERGUE était à nous,
Qu’il était tout prêt de la rendre,
Ne pouvant certes le défendre
Contre des FRANCAIS si vaillants
Et si vigoureux Assaillants.

 

En effet, chacun y fit rage,
À l’envi montrant son courage :
Oui, jusqu’aux moindres Champions
Semblaient là de petits Lions,
Et l’on eût dit que, Chez Mandoce,
Ils allaient vraiment à la Noce,
Comme ils courraient, de l’air qu’il faut
Et tête baissée, à l’Assaut.

 

Mais, sur tous, le sieur du PASSAGE,
Homme de coeur autant que sage,
À l’Attaque qu’il conduisit,
Fit merveille, ce m’a-t-on dit,
Comme il est aisé de le croire
D’un Brave chérissant la Gloire.

 

Monsieur le DUC de ROANNEZ,
Qui pour tel aussi je connais,
N’en fit pas moins dedans la sienne :
C’est votre croyance et la mienne,
Car ce DUC à si grands Exploits
Est la FEUILLADE d’autres fois,
Et lequel épousa naguère
Cette belle et sage HÉRITIÈRE,
MAD’MOISELLE [sic.] DE ROANNEZ,
Possédant maints et maints Jaunets.
S’il exploite d’aussi belle erre
En Mariage qu’à la Guerre,
Il faut sur son Front allier
Le Myrthe avecque le Laurier ;
Mais cela c’est une autre Affaire,
Dont, Lecteur, vous n’avez que faire,
Retournons donc à nos Moutons,
Ou, disons mieux, à nos Lions,
Afin de t’achever la Liste
De ceux qui, marchant sur la Piste
De Chefs si braves et si preux,
Y firent en Gens valeureux.
Mais, comme elle est fort ample, en Marge
Je m’en vais la décrire au large :
XXX
Aussitôt que notre LOUIS
Eut tous leurs vaillants Faits ouis,
Il tint, dit-on, CONSEIL de GUERRE,
Et puis, en divers Lieux sur Terre.
On commanda plusieurs PARTIS
De bons Soldats, tous assortis,
Qui sauront, à coups de Rapières,
Comme on dit, tailler des Croupières
À tous ceux qu’ils rencontreront,
Qui le PAS leur disputeront.
Mais il ne s’en rencontre guères,
Car les ESPAGNOLS Adversaires
Se tiennent de tous les Côtés
À couvert dedans les Cités,
Ordonnant aux Gens des Villages
(Mais qui ne sont pas si mal sages)
De venir de notre Courroux,
Pour leur Nez, essuyer les Coups,
Vu même que notre Grand SIRE
Leur Bonheur seulement désire.

 

-Puis vient le temps de la séparation :

Or, après maints ordres donnés,
Les deux illustres COURONNÉS
Partirent et se séparèrent
Et, pour tout dire en bref, tirèrent
Chacun d’un et d’autre côté,
La PRINCIPALE MAJESTÉ
Retournant devers son ARMÉE
Qui de sa Présence est charmée,
Et la REINE, des Coeurs l’Aimant,
Vers COMPIÈGNE pareillement,
Ayant eu toujours avec Elle
L’HÉROÏNE MADEMOISELLE.

 

-La reine trouve son fils malade de la petite vérole :

Mais, justes Cieux, à son retour
Audit COMPIÈGNE, son Séjour,
Que trouva la belle PRINCESSE,
Et lors quelle fut sa tristesse ?

 

Elle y trouva le Teint de Lys
De notre DAUPHIN, son cher FILS,
Caché sous un malin nuage
Qui couvrait tout son beau Visage,
Et qu’avaient formé ces deux Soeurs [la Rougeole et la Petite Vérole.]
Dont partout l’on craint les laideurs,
Notamment chez le charmant SIRE,
Qui, par là moins beau, moins nous vexe.

 

Vous en sentez, il est certain,
Des craintes pour ce grand DAUPHIN,
Et je crois que toute la FRANCE,
Le sachant, en serait en trance.

 

Mais allez, calmez vos soucis :
Vous reverrez ce jeune LYS,
Ce mignard AMOUR, ce bel ANGE,
Si digne de notre Louange,
Plus brillant qu’il ne fut jamais ;
Pour le sûr je vous le promet,
Et de COMPIÈGNE l’on nous mande
Que son Mal tout à fait s’amende.

 

Du même Lieu l’on mande aussi
Que rien n’est pareil au souci
Qu’en prend l’illustre MARÉCHALE
Dans cette Occasion fatale,
Et qu’il ne faut sinon la voir,
Toutes les fois qu’on veut savoir
L’état du susdit jeune SIRE
Dont la santé chacun désire,
Se peignant si bien dans ses Yeux
Que c’est là qu’on le connaît mieux,
Soit par les traits de la Tristesse,
Soit par les Traits de l’Allégresse.

 

Terminant ce Chapitre-ci,
D’illec encor j’apprends ceci
Que MADAME, sa belle TANTE,
Pour qui présentement je chante,
Ayant envoyé tendrement
Et par un souci bien charmant
Apprendre là de ses nouvelles,
En paroles à peu près telles,
Il répondit à l’ENVOYÉ,
Paraissant lors tout enjoué :
Qu’il rendait de toute son Âme
Grâces de ces soins à MADAME,
Ajoutant à ce Compliment
Celui-ci, des plus joliment :
Qu’il était de MADEMOISELLE,
Sa jeune COUSINE, si belle,
Entièrement le SERVITEUR
Et qu’il l’aimait de tout son coeur,
Dieu sait, comme elle est bien apprise,
Si sans vert il peut l’avoir prise.

 

-Retour de la guerre :

Mais retournons à CHARLEROI.
Pour le remettre en bon arroi,
Dix mille hommes, non de main
Y travaillent de belle sorte,
Et trois fois mille Cavaliers
Apportent à ces Ouvriers
Des Palissades et Fascines,
Car, pour le surplus, les Ruines
Ont fourni les Matériaux
Nécessaires à nos Travaux,
De manière que le FORT-CHARLE [sic.]
Aussi vrai comme je vous parle,
Se relève encor aux Dépens
De l’ESPAGNOL, bien en suspens
De voir qu’un Poste qui lui coûte
Sept millions, sans aucun doute,
Ne sert (ô, pour lui que d’hélas !)
Qu’à nous ouvrir les PAYS-BAS.

 

Présentement, FURNES est battue,
Ou déjà peut-être abattue,
Et nous verrons au premier jour
Qu’une autre Place aura son tour ;
Mais faisons sur d’autres Manières
Rouler nos Rimes Gazetières.

 

 

Lettre du 26 juin 1667, par Robinet.

 

-Des nouvelles :

On comprend bien, comme je crois,
Que ces NOUVELLES sont du ROI,
Et, certe[s], l’on devine juste,
Car c’est d’abord de cet AUGUSTE
Que je veux, de belle hauteur,
Entretenir notre Lecteur.

 

SA MAJESTÉ si magnanime,
Qu’une ardeur équitable anime,
Ayant enfin vu CHARLEROI
En état de donner la Loi
À plusieurs Places ses Voisines,
Qui ne seront pas ses Cousines
Si ce n’est que, bien sagement,
Elles se rendent doucement,
A décampé le dix-septième, [Le 17 du mois de Juin.]
Avec une allégresse extrême.
Laissant dans ce Poste Royal,
Pour GOUVERNEUR, le sieur MONTAL,
Avec maint autre excellent Homme.
Le sieur de MONTAL en qualité de Lieutenant du Roi, XXX
Et bonne Garnison, en somme,
Si bien qu’on n’y trouve à qui parler.

 

À ce départ, la belle ARMÉE,
Merveilleusement animée,
Se munissant contre la Faim,
Pour huit jours, dit-on, prit du Pain,
Sans qu’on sut lors, sinon par doute,
Quelle devrait être sa route.

 

Mais, ayant çà de là tourné,
On l’arrêta devant TOURNAI,
Afin de sommer cette Ville
De vouloir être assez civile
Pour y laisser entrer nos Gens,
Et, comme le Coc de Léans
Y répondit par négative,
Étant de nature rétive,
On fit ce qu’on fait en tel cas,
Et, pour moi, je ne doute pas
Qu’à Jubé l’on ne le réduise
Et que la Place ne soit prise,
Voire que bien d’autres après
Ne suivent son Destin de près.

 

Cependant, ce que je puis dire
Et très certainement écrire
Est que, tout depuis DARIUS,
Bien moins méchant qu’OLIBRIUS,
On ne peut avoir vu d’Armée
Si pompeuse et si bien armée,
Et qu’enfin il n’est rien si beau
Lorgné du sublime Flambeau,
Dedans ses Routes éclatantes,
Que le PARC de nos riches TENTES.

 

Mais il faut ajouter ceci
Qu’ALEXANDRE est en celle-ci,
Et que Soldats et Volontaires
Y sont tous de grands Militaires.

 

D’autre côté, chaque OFFICIER
Si fort s’applique à son MÉTIER
Qu’en Botte (c’est sans menterie)
On n’en voit nul d’Infanterie,
Et que tous, à leur Poste allant,
Ainsi qu’en état d’Assaillants,
Ont un Valet avec la Pique,
Et cela pour faire la nique
À qui, croyant par trop en l’air,
Croirait les surprendre sans vert.

 

Au reste, c’est une merveille
Qui n’a pas non plus sa pareille
De voir comme, pour les Soldats
Et les plus fieffés Goujats,
Le Butin a si peu de Charmes
Qu’ils laissent jusques sous leurs Armes
Venir paître Brebis et Boeufs,
Et les Poules faire leur oeufs,
Sans regards de concupiscence,
Non plus, en saine Conscience,
Que si c’étaient Dépôts sacrés
Et pour les Autels consacrés ;
Tellement que, d’un bout à l’autre,
L’ordre est tel dans ce bel OST nôtre
Que c’est, à dire la vérité,
La même Régularité.

 

Encor un mot de notre SIRE,
Dont jamais trop on ne peut dire.

 

Il n’est Mortel si vigoureux
Que ce MONARQUE généreux.
Il est, dès le point de l’Aurore
Jusqu’où l’on voit le Jour se clore,
Sans relâche sur son Cheval,
Plus fier cent fois qu’un Bucéphale,
Et, s’il faut qu’enfin il sommeille
Après une trop longue veille,
Cet infatigable HÉROS
Comme un Soldat prend son repos
Et sur la Paille, en grand volume.
Se couche, ainsi que sur la Plume ;
Si qu’alors chacun est, ma foi,
Couché de même que le ROI.

 

Mais qu’est-ce qu’on m’a dit encore ?
MONSIEUR, qu’après lui l’on adore,
Se mêle aussi semblablement
D’agir infatigablement,
Afin qu’en tout on le remarque,
Au second Rang, près du MONARQUE.

 

Après cela, que dirait-on
Si quelqu’un chantait sur le ton
De B mol [sic.] en cette Rencontre,
Et, bref, s’il ne faisait pas montre
D’une mâle et forte Vertu ?
Ah ! d’Honneur il serait perdu !

 

De FURNE, en mon autre Écriture,
Je devinai bien l’Aventure.
Depuis six jours, cette Cité
Était à notre MAJESTÉ,
Et le FORT de SAINT FRANCOIS même,
Tant, avec diligence extrême,
D’AUMONT sait, en expert Guerrier,
Cueillir un belliqueux Laurier.

 

Mais, à propos d’Exploits de Guerre,
Sur la Mer et non sur la Terre,
Le sieur CHEVALIER de CICÉ, [Chevalier de XXX.]
Au Métier de Mars très versé,
Avait, naguère, avecque gloire,
Réduit presque sous sa Victoire
Un Navire de Guerre Anglais,
Mieux monté que le Sien trois fois ;
Mais une insolente Grenade
Lui vint, par un coup trop maussade,
Emporter la Main et les Yeux
(Ô quel accident, justes Cieux !),
Puis une Balle meurtrière,
Ne pouvant lui rompre en visière,
Le frappa tellement au Chef
Qu’il tomba mort de ce méchef.
Jamais l’inhumaine BELLONNE
Traita-t-elle plus mal Personne ?

 

Le CHEVALIER de VILLEMOR,
Désirant venger cette Mort,
Fit, ce m’a-t-on dit, des Merveilles,
Lesquelles ont peu de pareilles
Et, quoi qu’il fût percé de coups,
Persistant dans son beau courroux,
Il combattit sans nul relâche
(Voyez si c’était être lâche),
Jusques à ce que le Destin
À leur Choc furieux mit fin.

 

Faute de place, en ma dernière,
Où me surmontait la Matière,
Je n’y pu narrer ces Exploits,
Et j’en rechignai mille fois,
Car c’est à tels Faits pleins de gloire
Qu’on doit un beau Rang dans l’Histoire.

 

Les TROUPES que le DUC LORRAIN
Envoie à notre SOUVERAIN,
Par zèle, par reconnaissance,
Et comme bon Ami de FRANCE,
Naguère, ont passé par ARRAS,
Et, laissant, de peur d’embarras,
En ce Lieu-là tout leur Bagage,
Qui bien souvent nuit au Courage,
Elles prirent, en bon arroi,
Leur Marche vers le CAMP du ROI.

 

-Rétablissement du Dauphin :

Le cher DAUPHIN de ce grand SIRE,
Que de plus en plus on admire,
Cet aimable Enfant (que DIEU gard [sic.])
Est à présent sain et gaillard,
Et, d’aise, chacun à la Joie
Abandonne son coeur en proie.
C’est avecque raison aussi,
Car, VERAMENTE, jusqu’ici
On n’a vu nul DAUPHIN en FRANCE
Dont l’on eut plus grande espérance.:

 

 

Lettre du 3 juillet 1667, par Robinet.

 

-La guerre à laquelle le roi participe, en personne :

LOUIS, de mine haute et fière,
Poursuivant sa marche Guerrière
Du FORT CHARLEROI vers TOURNÉ,
Qui sous nos LYS est retourné,
Eut avis que certains CROATES
(Qui sont de terrestres Pirates),
Sortis des Bois des environs,
Voulaient, en plaisants Fanfarons,
Venir charger sur le Bagage,
Pour en faire entre eux le Partage,
Or, pour les arrêter tout court,
Il y dépêcha ROMECOURT, [Lieutenant des gardes du corps.]
Homme de coeur, Homme de mise,
Qu’en son Métier beaucoup on prise,
Et son auguste MAJESTÉ,
Pleine de magnanimité,
Tout ainsi qu’un simple GENDARME,
Courut même au Lieu de l’alarme.
PHILIPPE, ayant oui le bruit,
Quoi qu’à peine il se mit au Lit,
En un tourne-main se rhabille,
Et ce jeune Héros qui brille,
Étant à Cheval remonté,
Aussitôt se vit au côté
Du grand et du martial SIRE,
Prêt à mieux faire encor qu’à dire.

 

Mais ROMECOURT, par un beau Sort,
Qui le fit louanger bien fort,
Avait, d’une verte manière,
Recogné jusqu’en leur Tanière
Ces grands Affamés de Butin,
Mais, au lieu duquel, le Destin
Les fit frotter d’étrange sorte
Par Gens qui n’ont pas la main morte.

 

À son arrivé à TOURNAI,
Notre admirable COURONNÉ,
Reconnut lui-même la Place
Avecque une Guerrière audace,
Cette PERLE des MAJESTÉS
Ayant MONSIEUR à ses côtés,
Avec le célèbre TURENNE,
Si sage et si preux CAPITAINE,
Et quelques autres de sa Cour,
Les plus dignes de son amour.

 

Puis, ayant soupé dans sa Tente
(C’est une chose très constante),
Au lieu de jouer au Triquetrac [sic.]
Ils allèrent au BIVOUAC,
C’est-à-dire faire la Ronde,
Tandis que Phoebus, dessous l’Onde,
Nous dérobait ses Feux brillants,
Pour empêcher les CASTILLANS
D’introduire dedans la Ville
Aucune chose illec utile,
Fut-ce Plomb, Poudre, ou Mèche enfin,
Nécessaire contre la Faim :
Et telle fut la vigilance
De ces Gens de Guet, d’importance,
Qu’ils passèrent, en ce Déduit,
La plus grande part de la Nuit,
Sans fermer qu’un peu la Paupière,
Au rivage de la Rivière,
Dessus un Fagot de Fétus,
Et tous bottés et tous vêtus.
Ah ! quel Lit ! qui le pourra croire,
Sur la Caution de l’Histoire ?

 

Le lendemain, sur nouveaux Frais,
LOUIS et PHILIPPE, aussi gais
Que s’ils eussent, cette journée,
Dormi la grasse matinée,
Firent, vers le milieu du Jour,
Encor de TOURNAI le contour,
Et la Garnison de la Ville,
Envers le ROI fort incivile,
Tira son Canon dans son GROS,
Mais sans tuer que trois Chevaux
(Tant les Boulet semblèrent sages),
Que, près de lui, montaient ses PAGES,
Dont l’un en reçut, loin du Chef,
Au Talon, un léger méchef,
Encore, ainsi qu’on me le note,
Fut-ce au seul Talon de sa Botte.

 

Mais laissons raillerie à part ;
Je ne vois rien là de gaillard,
Non plus qu’en ce que je vais dire,
Dont même d’effroi je soupire ;
C’est que ces HÉROS, trop hardis,
Dont les Pareils étaient jadis,
Furent à la TRANCHÉE ensemble.
Ah ! je le répète, j’en tremble,
Car, vrai comme je vous le dis,
C’était mêmes [sic.] en plein Midi.

 

De GRAMMONT, DUC, sans flaterie,
A Bravoure et Galanterie,
Se trouvant là, des plus avant,
Leur vint prestement au-devant
Et, d’une façon enjouée,
Fit les Honneurs de la Tranchée,
Les menant aux Endroits plus chauds,
Où, néanmoins, ces francs HÉROS
Tenaient la même contenance
Que dans quelque Lieu de plaisance.

 

MONSIEUR, des Dangers vrai Friant
Alla toucher, en souriant,
Jusqu’au Bois de la CONTRESCARPE
Je deviendrais aussitôt Carpe
Que d’en faire autant, par ma foi,
Et MONSIEUR, vraiment, n’est pas Moi.
Mais, cependant, bien davantage,
Ce beau PRINCE, plein de courage,
Ouit, presque fleur de sa Peau,
Siffler un maudit FAUCONNEAU,
Très homicide Oiseau de Guerre
Et foudroyant comme Tonnerre,
Sans s’en émouvoir aussi peu
Que si c’eût été quelque jeu.

 

Ah ! que les bons DESTINS les gardent !
Ces PRINCES par trop se hasardent ;
Et la VALEUR du GRAND HENRI,
Dedans leur beau Coeur aguerri,
Selon moi, renaît de la sorte
D’une manière un peu trop forte.

 

Mais discourons des ASSIÉGÉS.
Étant tout à fait outragés
De voir leur CONTRESCARPE prise,
Afin d’en tenter la Reprise
Et de débusquer, mêmement,
Les Nôtres de leur Logement,
Ils risquèrent une SORTIE,
Des meilleurs Soldats assortie.
Mais, hélas ! elle ne servit
Qu’à croître encore leur dépit,
Car, y perdants et plomb et poudre
Et maints coups de tonnante Foudre
Que l’on tirait de leur Rempart,
Ils se virent, de notre part,
Repoussés de telle furie,
Qu’au Diable donnant la Sortie,
Ils se retirèrent battus,
Et dos et ventre rebattus.

 

Outre les BATAILLONS des GARDES, [Françaises.]
Qui de coups pires que nasardes
Les chargèrent à qui mieux mieux,
Et leurs Officiers ainsi qu’eux,
Maints VOLONTAIRES d’importance
Et de la plus haute naissance
Y moissonnèrent des Lauriers
Dignes des plus fameux Guerriers.

 

MONSIEUR le DUC y fit paraître
De quel PÈRE il a reçut l’être,
Et, dans sa Guerrière chaleur,
Chacun reconnut sa Valeur
Du GRAND CONDÉ, que la VICTOIRE
A tant de fois couvert de gloire.
Comment ? au mépris des hasards,
Vouloir surpasser les CÉSARS
Et, dans l’humeur d’aller tout battre,
Se faire là tenir à quatre ;
Que dis-je, à quatre ? à dix, à vingt !
C’est être HÉROS plus que cinq
Et montrer qu’aux ÂMES BIEN NÉES
LA VALEUR N’ATTEND PAS LE NOMBRE DES ANNÉES.

 

Cela se vit encor à plein
En SAINT PAUL, son jeune Cousin,
Ce COMTE où l’on voit tant de grâce,
Qui, sortant presque encor de Classe,
Fut, bouillant d’un noble courroux,
Partager avec SAINT-SANDOUX [Capitaine des Gardes]
L’honneur d’arracher une PIQUE
(Tant déjà de gloire il se pique)
À l’un des Ennemis plus fiers
Et de leurs meilleurs Officiers,
Qui, de rage, cuida se pendre
D’être obligé d’ainsi la rendre.

 

L’AÎNÉ du feu COMTE d’HARCOURT,
Qui jamais ne demeura court,
D’ARMAGNAC, qui nous le retrace,
Y montra qu’il chassait de Race,
Courant, ainsi qu’un Daim léger,
Ou paraissait plus de Danger.

 

Notre GRAND CHAMBELLAN, de même,
Fit voir, par son courage extrême,
Qu’à bon droit il porte ce NOM,
Si pleine de gloire, de BOUILLON.
Le COMTE d’AUVERGNE, son FRÈRE,
Y montra d’une Âme guerrière
La belle ardeur pareillement,
De ses semblables l’Élément ;
Et, qui plus est, dans la TRANCHÉE,
Où la PARQUE était retranchée,
Ils s’étaient signalés tous deux,
Portant aux Lieux plus périlleux
Mainte et mainte grosse FASCINE.
Justes Dieux, que l’Honneur facine
Et leurre bien ces jeunes Coeurs
D’en faire des RICHARDS SANS PEURS,
Comme s’ils n’étaient pas des Hommes
De Chair et d’Os, comme nous sommes !

 

Mais achevons ; le DUC de FOIX
Augmenta là ses beaux Exploits,
Avecque le COMTE de ROUE,
Courant l’un et l’autre à la joie,
Ainsi que le Duc de CRÉQUI,
Et je ne sais pas encore qui :
Le MARQUIS de BEUVRON, je pense,
Où l’on se cognait d’importance,
De même qu’à quelque TOURNOI ;
Et c’est de quoi l’on nous fait foi.

 

Or donc, leur verte Répartie,
Faite à Madame la Sortie,
L’ayant contrainte prestement
À rentrer fort honteusement,
La BOUR

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